Le président Ibrahim Boubacar Keita (IBK) a accepté de démissionner à travers une déclaration depuis le camp militaire de Kati et qui a été diffusée en direct à 00H00TU sur la télévision malienne (ORTM). « J’ai décidé de quitter mes fonctions et toutes mes fonctions à partir de ce moment », a déclaré le chef de l’Etat, très abattu, avant d’annoncer également la dissolution de l’Assemblée nationale et du gouvernement.
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« Je voudrais à ce moment précis, tout en remerciant le peuple malien de son accompagnement au long de ces longues années et la chaleur de son affection, vous dire ma décision de quitter mes fonctions, toutes mes fonctions, à partir de ce moment. Et avec toutes les conséquences de droit, la dissolution de l'Assemblée nationale et celle du gouvernement ». C’est un IBK abattu après une rude journée éprouvante et visiblement résigné qui s’est adressé aux maliens, dans ce qui est désormais son dernier message à la nation et qui a été diffusée en direct à 00h00TU, à l’occasion d’une édition spéciale du journal télévisée de l’ORTM, la chaîne nationale. Avec pleins d’émotions et toujours sa verve qui a fait sa marque de fabrique, le désormais ex-président malien a rendu sa démission non sa avoir dit sa part de vérité. « Je pense qu’à chaque moment, sa vérité », devrait d’ailleurs dire IBK qui a souligné avoir tout donné et du pour « redresser le pays » durant ses sept ans au pouvoir. « Pendant sept ans, j'ai eu le bonheur et la joie d'essayer de redresser ce pays du mieux de mes efforts, car dès l'abord, dès ma première mission de chef de gouvernement de ce pays, j’étais convaincu de l'effort fabuleux qu'il fallait mettre en œuvre pour donner corps et vie à l'armée malienne. D'où cette idée de loi de programmation et d'orientation militaire », a expliqué celui qui était encore président. « Boua », du surnom qui lui a été affublé par ses sympathisants, a aussi affirmé avoir mis en garde sur les risques que font encourir au pays, les meneurs de la contestation qui a fait des victimes à qui il a tenu à rendre hommage. « J'avais toujours mis en garde vu que, quand on mène dans la rue, on ne sait jamais ce qui peut en résulter de bien ou de pire. Hélas, le pire en a résulté ! ». Et IBK de se demander, plus que jamais résigné de son sort, «si aujourd'hui, après des semaines de turbulences, de manifestations diverses, ponctuées hélas par des victimes, devant lesquelles je m'incline, que je ne suis jamais souhaitées, et chacun dans ce pays le sait, il a plu à certains éléments des FDS que cela devait se conclure par [sa] démission, ai-je réellement le choix que de m’y soumettre ? ». « Je ne souhaite qu'aucun sang soit versé pour mon maintien au pouvoir », s’est-il justifié avant d’annoncer sa démission et que la dissolution du gouvernement et de l’Assemblée nationale. En signe de requiem, le président démissionnaire a affirmé qu’il « n'éprouve aucune haine vis-à-vis de personne ». « Mon amour pour mon pays ne me le permet pas. Que Dieu nous sauve. Qu'Allah aide et bénisse le Mali», tels étaient les derniers mots d’IBK comme président.
Vide constitutionnel et incertitude politique
La messe est donc dite pour IBK qui a été acculé à la démission par les militaires après avoir tenu aux manifestations de rue de l’opposition. Cette démission, qui est certes prévue par la constitution, ne résout qu’une partie du problème car avec la dissolution du gouvernement et de l’Assemblée nationale, qui sont des prérogatives constitutionnelles du Président de la République, le Mali se trouve dans une sorte de vide constitutionnel. La Constitution n’est pas suspendue mais qui va assurer les charges de président par intérim en l’absence d’un Premier ministre ou du Président de l’Assemblée nationale ? Au cas où les mutins ainsi que les opposants se réfèrent à la Constitution, la Cour constitutionnelle peut certes éventuellement constater la vacance de pouvoir, mais qui va assurer les charges présidentielles jusqu’aux prochaines élections? Et si les putschistes assument leur coup de force et installent une transition militaire à la tête du pays, que vont dire la Cedeao et les autres organisations internationales comme l’UA, l’ONU, la France, les USA, l’UE et OIF qui ont déjà prévenu qu’elles s’opposent à « tout changement anticonstitutionnel » comme solution à la crise au Mali ? Autant de questions qui ne trouveront de réponses que dans les prochains jours en fonction de l’évolution des évènements, et notamment de la déclaration attendue des nouveaux maîtres du Mali. La CEDEAO a déjà annoncé une série de décisions et mêmes des sanctions et si cette démission est une prudence prise par les militaires putschistes, il n’en reste pas moins qu’il s’agit d’un «renversement du régime démocratiquement élu du président Ibrahim Boubacar Keita», qu’horripile l’organisation communautaire.
Plus que jamais, le Mali est de nouveau plongé dans une zone pleines d’incertitudes alors que des défis majeurs persistent toujours notamment la situation sécuritaire toujours critique ainsi que les velléités indépendantistes non encore éteintes des mouvements rebelles touaregs dans le nord. Des problématiques majeures pour le pays qui risquent d’être reléguées au second plan, avec de probables conséquences fâcheuses, par la résolution de cette crise politique qui est loin d’avoir tirée son épilogue. Autant dire que l’on s’achemine droit vers le saut dans l’inconnu que la communauté internationale redoutait et dont les maliens doivent gérer au mieux l’atterrissage pour éviter à leur pays une véritable descente aux enfers de laquelle le pays mettra du temps à se remettre…
A.Y.B (actuniger.com)
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