Cooperation France-Niger : Macron annonce le rappel imminent de son ambassadeur au Niger ainsi que le retrait de ses soldats d’ici la fin de l’année !
Dans un entretien ce dimanche 24 septembre diffusé en direct sur les chaines françaises TF1 et France 2, le président français Emmanuel Macron a annoncé le retour « dans les prochaines heures » de l'ambassadeur français à Niamey, et le retrait des troupes françaises du Niger d'ici la fin de l'année. Pour rappel, les nouvelles autorités nigériennes ont dénoncé, début août, les accords de coopération en matière de défense et de sécurité avec la France avant d’expulser par la suite, l’Ambassadeur Sylvain Itté du pays. Paris s’est jusque-là montré inflexible en mettant en avant qu’elle ne reconnait pas la légitimité des nouvelles autorités qui ont renversé le régime de Bazoum Mohamed et depuis, la pression n’a cessé de s’amplifier sur les symboles de la présence française au Niger avec le blocus par les forces de sécurité nigérienne de la chancellerie française ainsi que des manifestations populaires quasi-quotidiennes devant la base aérienne 101 de Niamey qui abrite l’essentiel des 1.500 soldats français au Niger.
L’annonce du président français a été accueillie comme une victoire par les manifestants qui ce dimanche encore s’étaient massivement rassemblés devant « le rond-point de la résistance », à la devanture de la base aérienne 101 de Niamey, où sont stationnés les soldats français.
Après donc près de deux mois de bras-de-fer diplomatique et surtout d’inflexibilité des autorités françaises, Emmanuel Macron a fini par céder : « la France a décidé de ramener son ambassadeur. Dans les prochaines heures, notre ambassadeur et plusieurs diplomates rentreront en France ». Le chef de l’Etat a aussi annoncé le retrait des soldats français du Niger, « dans les semaines et les mois qui viennent » et que le retrait serait totalement achevé « d'ici la fin de l'année ».
« Nous mettons fin à notre coopération militaire avec les autorités de fait du Niger, car elles ne veulent plus lutter contre le terrorisme. Nous nous concerterons avec les putschistes parce que nous voulons que ça se fasse dans le calme. Nous ne sommes pas là pour être les otages de putschistes. Nous continuerons d'aider le continent africain pour lutter contre le terrorisme. Mais seulement si cela émane de gouvernements démocratiquement élus ». Emmanuel Macron
Bien que Macron ne l’a pas ouvertement concédé, beaucoup voient à travers cette annonce, le signe que poussé à la porte par les nouvelles autorités militaires et les populations, Paris a fini par céder. Jusque-là, la France s’est montrée, en effet, intraitable sur la question de sa présence au Niger. Malgré la dénonciation, début août, des accords militaires par le CNSP ainsi que les manifestations qui se succèdent à Niamey et dans les grandes villes du pays, les autorités françaises ont fermement maintenu qu’elles ne discuteront de ces questions qu’avec l’ancien président Bazoum Mohamed, toujours gardé par les militaires depuis son renversement le 26 juillet dernier.
Qu’est ce qui a donc changé entre-temps pour que la France revoit ses prétentions et change subitement de posture ? Pour beaucoup d’observateurs, la situation étaient devenue intenable avec le quasi-blocus imposé par les forces de sécurité nigérienne au niveau de l’Ambassade de la France à Niamey, où Sylvain Itté et les quelques diplomates restés après l’opération de rapatriement des ressortissants français, vivaient reclus, « en otage » comme l’a reconnu lui-même Macron dans une déclaration la semaine dernière, sans approvisionnement et ni même internet. Les 1500 soldats français stationnés à Niamey, Ayerou et Ouallam vivaient également le même calvaire et la situation se dégradait de jour en jour avec le ravitaillement qui était quasi-impossible alors qu’aucune opération militaire conjointe avec les forces nigériennes n’était désormais plus possible.
L’autre argument qui a également participé à cette volte-face française, c’est l’éventualité d’une intervention militaire de la Cédéao, que Paris affirme soutenir, et qui s’éloigne de plus en plus avec beaucoup de pays, et pas de moindre, qui se montrent réfractaire à cette option risquée.
Fin de la coopération militaire entre Paris et Niamey
Bien que la France, comme l’a annoncé encore dimanche soir le président Macron continue de considérer le président déchu comme « la seule autorité légitime » du pays, il a annoncé des concertations avec « les autorités de fait » de Niamey, afin de préparer dans le calme le retrait des soldats français du Niger.
Ainsi donc, comme cela a été le cas au Mali et au Burkina, c’est en queue de poisson que finie la coopération militaire entre la France et le Niger. Après dix années d’opération militaire antiterroriste dans le Sahel, la France ne dispose désormais que d’une présence au Tchad bien que le président français continue d’affirmer que l’opération « Barkhane a été un succès ». Ne manquant de rappeler, comme à chaque occasion, que les soldats français sont intervenus dans la sous-région à la demande de Bamako, Ouagadougou, il a martelé que « sans celle-ci (Barkhane), la plupart de ces pays auraient déjà été pris par des califats territoriaux et des djihadistes ». Très virulent à l’égard des juntes militaires qui ont pris le pouvoir dans les trois pays, il a assené que Paris ne s’ingère pas dans les affaires politiques intérieures. « Nous ne sommes pas là pour être les otages des putschistes » parce que « les putschistes sont les amis du désordre », a dit Macron, avançant sans donner les preuves que les attaques terroristes faisaient « des dizaines de morts chaque jour au Mali » et qu’elles avaient repris de plus belle au Niger. « Je suis très inquiet pour cette région », a poursuivi Macron pour qui, « la France, parfois seule, a pris toutes ses responsabilités et je suis fier de nos militaires. Mais nous ne sommes pas responsables de la vie politique de ces pays et on en tire toutes les conséquences ».
Des accusations qui n’engagent que lui selon un acteur de la société civile à Niamey car tout ce qui compte pour l’heure, a-t-il ajouté, « c’est la fin de cette présence militaire française au Niger qui viole notre souveraineté et ne nous apporte aucun avantage ». Et il n’est pas le seul à le penser…
A.Y.Barma (actuniger.com)