Lettre ouverte citoyenne de félicitations au président Tchadien Idriss Déby pour son élévation à la Dignité de Maréchal par la Représentation nationale (Par Djibrilla Mainassara Baré)
M. le président de la République,
L’actualité brûlante dans notre sous-région, m’autorise à revenir sur votre élévation, le 11 Août 2020 à N’Djaména, à la dignité de Maréchal du Tchad, l’ultime niveau de la hiérarchie militaire pour récompenser votre bravoure sur le terrain de guerre, selon les propres termes de la représentation nationale de votre pays. Cette montée en grade s’est déroulée au cours d’une cérémonie riche en couleurs qui a coïncidé avec le 60 ème anniversaire de l’indépendance de votre pays. La guerre est une source extrême de souffrances, avec la perte quotidienne d’êtres chers, et des dégâts matériels. C’est pourquoi, tout homme qui maîtrise cet art et la communication dans le commandement des hommes qui lui est dédié, ne peut être qu’élevé au rang d’être exceptionnel. Ne l’oublions pas, la mort est l’une des premières peurs de l’homme toutes races, toutes ethnies, tous pays et tous continents confondus. La pandémie de la Covid 19 vient de le souligner, s’il en était encore besoin.
Si le peuple Tchadien vous a honoré, c’est qu’il a été convaincu en maintes occasions, que vous êtes celui qui, au risque de sa propre vie et de celle de ses enfants, est prêt à préserver celle du peuple. C’est valable pour la communauté internationale où l’armée Tchadienne qui a prouvé son efficacité chaque fois qu’elle a été sollicitée sur des théâtres d’opérations.
Votre consécration est liée à la satisfaction et à la réjouissance de tous les députés qui, « au nom du peuple, rendent hommage à l’homme qui a dédié sa vie à la souveraineté et à la stabilité du pays en se dressant comme un bouclier au péril de sa vie, évitant au Tchad et à la sous-région de replonger dans la profondeur de l’instabilité ». Cet hommage était la suite logique de l’affront de Boko Haram lavé par les Forces Armées Nationales Tchadiennes (FANT) dont vous aviez pris le commandement sur le terrain, à travers l’opération « Colère de Bohoma ».
- le président de la République,
Cet honneur, vous l’avez amplement mérité parce que vous aviez perpétué la mémoire de Sun Tzu (544–496 avant notre ère), le grand stratège chinois auteur du fameux traité, « l’Art de la guerre », qui avait proclamé : « Un grand dirigeant commande par l'exemple et non par la force ».En tant que spécialiste de l’art de la guerre, à la réputation mondiale établie, quel sort auriez-vous réservé à cette catégorie de hauts responsables de nos armées que le monde entier vient de découvrir ? De mémoire d’homme, dans toute l’histoire de l’humanité, c’est la toute première fois que nous découvrons des chefs militaires qui ont eu le cynisme de livrer des munitions et/ou des armes défectueuses à leurs troupes déployées sur le terrain. De tels responsables méritent–ils de diriger une armée ? Existe-t-il, sur le plan international, des mécanismes pour dénoncer de tels dysfonctionnements et des instruments de mesure et de répression d’un tel type de mauvaise gouvernance ? Les protocoles de bonne gouvernance sont pourtant brandis à tout bout de champ, quand il s’agit de réprimer les peuples ou de les spolier de leurs droits à la bonne gouvernance. Ces pratiques, ne s’apparentent- elles pas finalement à des crimes contre l’humanité ? Ce sont des questions qui méritent réflexions, tellement ces faits suscitent l’indignation générale. Et, j’en suis sûr, certains concitoyens rétorqueront que nul n’a le droit de s’indigner. Au nom d’un esprit de clan de mauvais goût, en oubliant que tous les citoyens sont liés par le pacte Rousseauiste.
Votre consécration, m’a rappelé au souvenir d’un pays du Gondwana, où des responsables militaires ont profité honteusement de l’opportunité des conflits armés, pour accumuler d’immenses richesses, en usant des subterfuges classiques connus de surfacturation et/ou de non livraisons ou de livraisons fictives de matériel militaire. Au point où un ministre intègre, chargé du secteur, physicien émérite de son état, indigné, a pensé que lesdits responsables de ces crimes de haute trahison ne devaient mériter que d’être soumis à la loi de l’apesanteur, comme l’aurait fait naguère, disait-il, le président Jerry Rawlings du Ghana pour des délinquants financiers de son pays.
Comme je l’avais également rappelé dans ma précédente lettre, je suis certain qu’il ne pourrait jamais vous passer par la tête, l’idée de sacrifier des vies humaines de jeunes soldats tchadiens, pour votre enrichissement personnel. Le tout en dissertant sur l’insuffisance des contributions financières des partenaires techniques et financiers dans l’effort de guerre ou de la faiblesse du mandat donné par l’ONU aux forces combattantes déployées sur le théâtre d’opération. En tant que dirigeant pragmatique, vous n’avez jamais été non plus un adepte des slogans creux et des grands discours sur la guerre dans les fora internationaux.
- le président de la République,
Vous me permettrez de révéler que j’ai été plus que ravi de vous entendre dire, en réponse aux députés qui venaient de vous honorer : « Je dédie cette dignité suprême à mes frères d'armes. C'est à eux que revient le mérite des faits d'armes qui est salué par le peuple. (…) À ceux qui s’étonnent qu’un Chef d’État soit aux côtés de ses troupes en opération, je leur réponds simplement qu’il est des moments qui sont faits pour travailler dans la douceur des bureaux climatisés et il y a des moments où un Chef doit partager la rusticité du terrain avec ses hommes, surtout lorsque la survie de la Nation est en jeu ».
Preuve irréfutable, s’il en était besoin, de votre stature d’Homme d’Etat qui sait que tout mérite ou toute distinction est l’œuvre d’une équipe et non d’un seul homme. En d’autres termes, vous reconnaissez que vous n’êtes champion, que parce que d’autres ont autant, sinon plus de mérite que vous dans l’atteinte d’un objectif.
La suite de votre discours devait être rappelé aux Chefs suprêmes de nos armées, afin qu’ils puissent s’en inspirer pour remobiliser les forces de défense et de sécurité. Vous aviez martelé en effet : « J’étais un soldat avant d’être Général, puis Maréchal. Je sais ce que c’est qu’une campagne militaire. Je sais ce que c’est la guerre et les règles qui la gouvernent. Bref, je sais comment se gagnent les batailles. Les batailles se gagnent par l’abnégation des hommes qui, arme à la main, font face à l’ennemi sur le terrain…C’est pour vous dire, Mesdames et Messieurs, que plus que dans tout autre métier, dans le métier des armes, il n’existe point de gloire personnelle d’un Chef. Toute victoire est collective et les honneurs liés à une victoire doivent par conséquent naturellement couvrir tous ceux qui ont participé à cette victoire. »
Et vous l’avez surtout rappelé, « la guerre ne mériterait pas d’être honorée si elle n’était pas sous-tendue par des raisons légitimes et par des objectifs nobles. »
N’avons-nous pas en effet été témoins de ce que de hauts responsables de l’armée aient précipité leur pays dans des guerres injustifiées pour des raisons inavouables ?
Votre mérite est d’autant plus grand qu’il a été malheureusement observé, de par le monde, que non seulement certains hauts responsables en charge de la sécurité de leur peuple, restent non seulement confinés dans le luxe de leurs résidences mais certains se permettent même de concentrer les moyens importants pour leur seule sécurité au grand dam de la sécurité nationale. Et le plus grand drame est le fait qu’il soit risqué de dénoncer de tels excès.
J’ai retenu que le Sage de Bandiagara Amadou Hampâté Bâ a dit : « Quelle que soit la valeur du présent fait à un homme, il n'y a qu'un mot pour témoigner la reconnaissance inspirée par la libéralité, et ce mot c'est : merci. »
Alors, au nom de tous les Africains, encore une fois merci, Monsieur le Président et qu’Allah SWT vous garde et vous bénisse.
Je vous approuve parce que vous avez bien retenu les enseignements de Shaykh Abdu-l-Azîz Ibn Baaz qui a dit : « Il n’est pas permis d’être orgueilleux à cause de la richesse, de l’emploi, de l’origine, de la beauté, de la puissance, ou d’autres choses. Au contraire, il faut se rappeler que ces dons sont les bienfaits d’Allah (qu’Il soit Exalté) et qu’on doit Lui en être reconnaissant par la modestie, l’humilité et l’abstention de l’arrogance. L’arrogance mène à l’oppression, au mensonge et à l’injustice en paroles et en action. Elle conduit l’homme à se considérer comme supérieur à son frère (…)».
Merci Président !
Veuillez agréer, M. le président, l’assurance de ma très haute considération.
A Niamey, le 27 août 2020
Djibrilla Mainassara Baré - Economiste
Ancien Conseiller Spécial du président Baré
Candidat désigné à l’élection présidentielle de 2020 au titre de l’UDFP SAWABA
Commentaires
La sagesse chinoise n'enseigne t elle que lorsque le sage montre la lune, l'imb