Massacre de Moura : le statuquo perdure un (1) an après le drame (Par Ismaël Djibo)
Le 27 mars 2022 restera un jour gravé dans la mémoire collective des populations du village de Moura, localité située dans la région de Mopti, au centre du Mali. Ce jour-là, c’est au moins 400 civils qui ont été massacrés dans le cadre d’une opération militaire conjointe menée par les Forces Armées Maliennes (FAMA) et leurs supplétifs russes de Wagner qui ont fait leur entrée dans la bourgade sous prétexte de mettre hors d’état de nuire des éléments terroristes de la katiba Macina d’Amadou Koufa.
Sauf qu’en lieu et place d’une opération visant uniquement les terroristes, les villageois de Moura, ce village pointé d’une infiltration terroriste a payé un lourd tribut suite à l’amalgame qui a été fait.
L’un des signes qui aurait conduit à cet amalgame serait l’accoutrement des hommes qui portaient des pantalons courts et des barbes à la manière des éléments des groupes terroristes. Et sans aucun esprit de discernement, les FAMA et les éléments de la force militaire privée russe Wagner ont procédé à des interpellations puis à l’exécution de leurs de ceux-là qu’ils ont qualifié des éléments d’Amadou Koufa.
A la fin de l’opération dénommée kélétégui qui a duré presque une semaine et qui avait pour objectif de : neutraliser les éléments de la katiba Macina affiliée au Groupe de Soutien à l'Islam et aux Musulmans (GSIM) qui contrôlent la zone, c’est plus de 400 personnes civiles y compris des femmes et des enfants qui ont été tuées.
Des sources dignes de foi évoquaient pourtant que les terroristes qui ont infiltré Moura ne dépassait guerre une trentaine. Et pourtant l’armée malienne et ses supplétifs de Wagner se réjouissaient de l’élimination de plus de 200 terroristes.
Dans la foulée de ces massacres, plusieurs organisations de défense des droits humains se sont levées pour exiger des enquêtes indépendantes afin d’éclaircir toutes les zones d’ombre qui caractérisent le massacre de Moura.
Aujourd’hui, douze (12) mois se sont écoulés et c’est toujours le statuquo, aucune enquête sérieuse n’a été menée pour situer les responsabilités sur ce qui s’est réellement passé à Moura en mars 2022.
Wagner, une force sécuritaire qui isole le Mali
La force de sécurité privée Wagner est plus un problème qu’une solution pour le Mali dans sa lutte contre le terrorisme.
En dehors de l’absence des résultats, elle est à l’origine de plusieurs violations des droits de l’homme dans le pays. Sa présence a engendré un isolement diplomatique du pays qui n’entretien des bons rapports qu’avec les deux (2) autres juntes au pouvoir dans la région.
La souveraineté dont parle le Mali aujourd’hui n’est qu’une vue de l’esprit car au moins 1/3 du territoire est occupé par les groupes terroristes contrairement au Niger s’en sort beaucoup mieux en matière de stabilité dans la zone dite des trois (3) frontières.
En se penchant vers la Russie, le Mali est en train de créer inéluctablement les conditions de son isolement sur le plan international.
La Russie est loin d’être le modèle de coopération qu’elle miroite aux pays africains avec un concept économique anachronique eu égard aux aspirations actuelles des Etats africains. Mais ceci importe peu, puisque cette offensive diplomatique se fonde moins sur la performance des termes de la coopération économique que sur la construction d’une alliance politique la plus vaste possible avec les pays du continent, dans le but de renforcer l’influence de la Russie sur la scène internationale.
La présence de Wagner n’a rien changé dans la lutte contre l’hydre terroriste.
Au Mali où la milice compte près de 2000 hommes aujourd’hui, les autorités du pays continuent de les désigner comme des « instructeurs ». Comment s’en étonner au fond, lorsque l’on sait que par nature, une entreprise de mercenaires n’avance jamais à visage découvert ? L’anonymat, le camouflage ou la clandestinité constituent l’apanage du mercenariat. Et ceux qui y ont recours endossent à leur tour ces caractéristiques, telle une inconfortable complicité.
Global initiative dans son rapport souligne que le groupe Wagner, créé en 2014 par Evgueni Prigogine, un allié de proche de Vladimir Poutine est aujourd’hui « accusé d’utiliser tous les moyens y compris de nature criminelle, pour atteindre ses objectifs : du recours aveugle à la violence contre les civils dans ses actions militaires, aux campagnes de désinformation et à la fraude électorale, en passant par le trafic à l’échelle industrielle de ressources naturelles, comme l’or et les diamants. Le groupe opère dans la zone grise, qui inclue à la fois l’économie légale et illégal. Wagner apparait ainsi comme une entreprise à ressorts multiples dont les activités et les objectifs dépassent largement le seul cadre de « l’assistance militaire ».
(Par Ismaël Djibo)
Commentaires
A Moura, quelle organisation