Mohamed Bazoum veut assurer la sécurité pétrolière de son pays
Le Niger ne cache pas son intention de compter parmi les plus grands pays producteurs de pétrole du continent africain. Cet état d’Afrique de l’Ouest s’est donc doté d’une équipe de choc, qui devra relever des défis majeurs, à commencer par la sécurité pétrolière et la lutte contre les hydrocarbures de contrebande. Décryptage.
Le Niger annonce la couleur, et ce sera celle du pétrole. Le pays ambitionne de devenir l’un des plus grands pays producteurs de pétrole du continent africain, et ce dès 2025. L’État souhaite faire des hydrocarbures le levier principal de l’économie, au point de générer jusqu’à la moitié des recettes fiscales du pays. Il vise la production de 500 000 barils quotidien à horizon 2025-2030. La marche est haute, puisqu’il n'en produit que 20 000 actuellement. Conscient du chemin à parcourir, le Niger doit d’abord franchir un palier intermédiaire de 110 000 barils par jour d’ici 2023.A terme, l’État espère que le pétrole contribue à hauteur de 25% au PIB en 2025, contre 4% en 2017.
Le président s'entoure des plus grands experts du secteur
Reste à réunir les moyens techniques et humains pour atteindre cet objectif. Le président Mohamed Bazoum, élu en avril 2021,est déjà sur tous les fronts et soigne son entourage. D’après Africa Intelligence, ce dernier suit de près les négociations d’importance :telles celles avec Sipex (branche internationale de l’entreprise pétrolière et gazière algérienne Sonatrach), ou encore les discussions qui ont trait aux nouveaux contrats de partage de production avec Savannah Energy, société énergétique britannique indépendante axée sur l’Afrique.
Pour mener sa politique pétro compatible, le dirigeant du Niger s’appuie également sur Mahamane Sani Mahamadou, son ministre du Pétrole et de l’Énergie, et sur Mamadou Sougou Dikouma, son conseiller sur les dossiers pétroliers et miniers. Un trio devenu quatuor, avec la nomination d’Ibrahim Mamane à la tête de la Société nigérienne du pétrole (Sonidep) : celui-ci avait œuvré auparavant comme chef du projet de construction de la mine de charbon de Salkadalma, dans la région de Tahoua, au nord-ouest du pays.
Du côté du ministère de l’Énergie, les troupes sont aussi en rang de bataille : Mahamane Sani Mahamadou a constitué son équipe de confiance,comptant, entre autres, Mahamadou Abara, ancien directeur de cabinet de l'ex-ministre du Pétrole (Pierre FoumakoyeGado),aujourd’hui conseiller technique, etBoubéHamani, directeur des hydrocarbures. Le ministère a également reconduit la société française de conseil Drake&Bart, qui suivra de près les dossiers hydrocarbures.
Des solutions techniques afin d'assurer la traçabilité du pétrole
Pour atteindre l’objectif des 25% du PIB, cette équipe va devoir se pencher sur un dossier sensible : celui de la contrebande de pétrole provenant du Nigéria voisin. « Ce carburant frauduleusement importé coûte souvent deux fois moins cher qu'à la pompe, où l'essence est vendue au Niger 540 francs CFA (82 centimes d'euros) le litre », rappelle un article de la BBC. Pour tenter de couper la pompe, des actions coups de poing sont régulièrement menées. On se souvient de la saisie à Niamey de 300 000 litres de carburant introduits illégalement depuis le Nigéria, lors de l’opération « Zéro point de vente illégal ». Pourtant, le problème perdure et les pertes pour le Trésor nigérien sont estimées à plusieurs milliards de francs CFA par an, en taxes et impôts. D'ailleurs, le commerce illicite de carburant coûterait, chaque année, à l'économie mondiale la bagatelle de 133 milliards de dollars.
Pour tenter de remédier au problème, le gouvernement a choisi d’intégrer, courant 2021,une technologie de marquage moléculaire des hydrocarbures destinée à un usage domestique. Cette solution permet de suivre légalement le carburant taxé (essence et diesel) dans le pays. Par ce biais, l’État espère réduire la fraude de manière significative et en un temps record, afin de reprendre la main sur l’ensemble des enjeux financiers liés à la fiscalité associée aux produits pétroliers.
Les bénéfices du marquage
L’État nigérien fonde de grands espoirs sur cette technique car non seulement le carburant introduit illégalement dans la chaine d'approvisionnement entraîne des pertes fiscales considérables mais représente également un danger majeur pour l'environnement et la santé des citoyens. Grâce à la société suisse SICPA et à son partenaire sur place Bureau Veritas, le Niger pourrait commencer à s'attaquer au fléau de la contrebande.
Car le marquage des produits pétroliers a déjà fait ses preuves ailleurs : de l'autre côté du continent, de nombreux pays d’Afrique de l’Est, comme la Tanzanie, le Mozambique ou l'Ouganda, ont fait les frais de la contrebande de pétrole. Mais en Ouganda, la vente d’essence trafiquée aurait chuté de 29% à moins de 1% grâce à l'introduction d'un système de marquage, d'après un rapport de l’Atlantic Council.
Le Niger pourrait ainsi, grâce à de nouvelles recettes fiscales, être en mesure d'assurer sa sécurité pétrolière mais aussi de relever les nouveaux défis humanitaires qui l'attendent à ses frontières, compte tenu de l'instabilité grandissante des États voisins, comme le Burkina Faso, ou le Mali...
Guy-Victoire SANBENA, Analyste géopolitique
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