Promotion des Droits humains et de l’accès à la Justice : le Projet ADALCI renforce les capacités des juges d’instruction, un maillon essentiel de la chaîne judiciaire
Du 25 au 27 janvier 2022, Niamey abrite un séminaire de formation des juges d’instruction, à l’initiative de l’ONG Search for Common Ground (Search) et de la Cour de Cassation. Cet atelier de renforcement des capacités des juges d’instructions, véritable gardiens des libertés, entre dans le cadre de la mise en œuvre des activités du Projet pour la promotion des Droits de l’Homme et l’amélioration de l’Accès à la Justice au Niger « ADALCI » (Equité en haoussa), mis en œuvre par Search en collaboration avec l’Association du Barreau Americain-Initiative de l'Etat de droit (ABA-ROLI) et Pact, et financé par l'Agence des Etats-Unis pour le Développement International (USAID) à travers Freedom House, son mécanisme de soutien aux Droits de l'homme.
C’est le ministre de la Justice, Garde des Sceaux, M. Ikta Abdoulaye Mohamed, qui a procédé à l’ouverture officielle du séminaire qui s’est déroulé le mardi 25 janvier 2022, à l’hôtel Bravia de Niamey.On notait la présence à cette occasion du Premier président de la Cour de Cassation, M.Abdou Zakari , de la Représentante de la Mission de l’USAID au Niger, Mme Asta Zinbo, de la Directrice de Search for Common Ground, du Directeur du Programme ADALCI, M. Daniel Dobrovoljec, des hauts magistrats de la Cour de Cassation ainsi que de plusieurs invités au rang desquels des avocats et des acteurs du système judiciaire nigérien et de la société civile.
Plusieurs allocutions ont marqué la cérémonie d’ouverture dont celle de bienvenue du Premier président de la Cour de Cassation qui a tenu à souhaiter la bienvenue à tous les participants avant de situer l’enjeu de ce séminaire de formation pour le renforcement d’une justice véritablement indépendante et moderne au Niger. Le magistrat Abdou Zakari s’est en ce sens félicité de cette importante contribution du Projet « ADALCI » pour la promotion des Droits de l’Homme et un meilleur accès des citoyens à la justice au Niger, et a tenu, à juste titre à remercier les différents partenaires techniques et financiers pour la réussite de cette initiative qui vient accompagner la réforme et la modernisation du système judiciaire au Niger.
Le Projet « ADALCI » pour accompagner la réforme et le renforcement du pouvoir judiciaire au Niger
Dans son intervention, le coordinateur du Projet « ADALCI » a indiqué que ce séminaire est le premier d’une longue série de sessions de formation qui seront organisé dans le cadre du partenariat signé avec la Cour de Cassation et qui vise comme principal objectif, d’ accompagner le renforcement des capacités des magistrats. « Nous sommes très fiers de ce partenariat et de l’opportunité de participer à l'œuvre de modernisation et de renforcement du système judiciaire nigérien », a déclaré M. Daniel Dobrovoljec qui a rappelé que le projet « Adalci », financé par l’USAID et mis en œuvre par un consortium formé par l’organisation américaine Search for Common Ground (SFCG) et l’Association du Barreau américain (ABA), a démarré ses activités en 2020 pour une durée de 4 ans. Son objectif général, a-t-il ajouté, est de « combattre l’extrémisme violent en mettant l’accent sur la défense des Droits humains et l’accès à la Justice, dans toutes ses composantes ». Il s’agit notamment de la Justice traditionnelle, qui, historiquement au Niger joue un rôle considérable dans le règlement des conflits; de la Justice formelle, dont les capacités peuvent être renforcées par des moyens supplémentaires et par des formations de magistrats ; et enfin, la promotion et la protection des Droits humains, avec un appui a la Commission Nationale des Droits humains (CNDH) et aux organisations de la société civile afin de renforcer leurs moyens d’ intervention, d’enquête et de protection.
« Le séminaire qui commence aujourd’hui, pour une durée de 3 jours, s’inscrit dans le cadre du deuxième objectif du Projet ADALCI qui concerne le renforcement des capacités des principaux acteurs du système judiciaire nigérien notamment les magistrats », a souligné le coordinateur du Projet qui a par la même occasion a indiqué que cette première session de formation est centré sur la pratique et les procédures de l’instruction, au sens large, mais aussi les actes des juges d’instruction, leur statut et leurs activités, leur interaction avec les autres acteurs importants de l’instruction, tels que les OPJ, les greffiers, les avocats et les parties civiles. « L’instruction est une partie centrale du système judiciaire nigérien et, de façon générale du système romano germanique (ou comme disent les anglo-saxons, du système de la « civil law »), basé sur une instruction indépendante et impartiale », a mis en exergue Dobrovoljec pour qui cette indépendance théorique qui incombe aux juges d’instruction et qui es liée à son statut de magistrature assise, « l’oblige a l’exercice périlleux de l’impartialité d’une instruction juste qui se doit de n’être ni à charge ni à décharge, sans concessions vis-à-vis de l’application de la loi, mais dans le respect des droits humains ».
Poursuivant son intervention introductive, le coordinateur du Projet « ADALCI » a ajouté que le séminaire abordera aussi les attributions et missions des cabinets d’instruction et de leur administration qui constituent également une pierre angulaire du développement de l’efficacité de I’ instruction, et partant, de l’administration de la justice. « Ce séminaire, pour qu’il soit une réussite, doit être placé sous le signe du débat, de l’interactivité et de la communication, pour lesquels nous comptons sur vous », a adressé M. Daniel Dobrovoljec aux participants, tout en soulignant par la même occasion que de larges parties du programme de ce séminaire sont justement consacrées au débat avec les hauts magistrats de la Cour de Cassation qui vont l’animer. « Je suis certain que vous appréhendez l’importance de ce séminaire qui a pour but, in fine d’améliorer le fonctionnement du système judiciaire nigérien, afin que celui-ci soit davantage compris et respecté par les citoyens et les justiciables », a indiqué le coordinateur qui a tenu également à réitérer l’engagement des principaux partenaires de la mise en œuvre de ce projet a accompagné les efforts des autorités dans la réforme et la modernisation du système judiciaire nigérien. « Notre projet ADALCI se tient et se tiendra résolument aux cotes des autorités judiciaires, avec |’aide et sous la coordination de l’USAID, afin de participer à la modernisation et au renforcement du Pouvoir judiciaire nigérien », a assuré le coordinateur du Projet, M. Daniel Dobrovoljec.
Pour sa part, la Représentante de l’USAID a souligné toute l’importance du projet ADALCI, un projet qui a été conçu pour améliorer l’accès à la Justice pour les citoyens et aussi pour renforcer les Droits humains, ce qui, selon Mme Asta Zinbo, constitue « une priorité non seulement pour les Nigériens mais aussi pour le gouvernement des Etats Unis ». En effet, a-t-elle indiqué, le Projet qui est mis en œuvre dans trois régions du pays en conflits (Tillabéri, Tahoua et Diffa), fournit aux personnes et aux comités des outils nécessaires dont ils ont besoin pour faire valoir leur droit. La Représentante de l’USAID n’a pas manqué de revenir sur les trois axes principaux dudit projet ainsi que leurs objectifs spécifiques à savoir : la résolution des conflits par des mécanismes coutumiers qui ont déjà fait leurs preuves au Niger, le renforcement des mécanismes de justice formelle pour que les populations dans les zones touchées par la violence et l’extrémisme violent soient habilitées à accéder au système de justice formelle pour résoudre leur différend et faire valoir leur droit et aussi de travailler avec les organisations de la société civile. Elle a invité en ce sens les participants à s’approprier les objectifs assignés à ce séminaire pour atteindre les objectifs visés par les autorités et aussi à partager leur connaissance ainsi que les acquis de cette formation qui vient renforcer leurs capacités et partant celle du système judiciaire nigérien.
La formation des magistrats, une priorité pour améliorer l’efficacité du système judiciaire et restaurer la confiance des citoyens
En procédant à l’ouverture officielle du séminaire, le ministre de la Justice, Garde des Sceaux s’est félicité de cette initiative, fruit du partenariat entre la Cour de Cassation et le Projet ADALCI et dont les objectifs s’alignent aux priorités du gouvernement dans la droite ligne de ceux du programme de la Renaissance Acte III portés par le Président de la République SEM. Bazoum Mohamed. « La justice est l’une des institutions sur lesquelles repose l’Etat de droit et la démocratie. De nos jours, la justice est a la croisée des chemins et fait face a des citoyens de plus en plus avertis et exigeants », a souligné M.Ikta Mohamed Abdoulaye, pour qui, en effet, « nos concitoyens aspirent à une justice plus accessible, plus proche et plus diligente dans le traitement de leurs dossiers. En un mot, ils aspirent à une justice a même de mieux garantir leurs droits et libertés et leur assurer une protection, en résumé une justice de qualité ».
Le ministre de la Justice a ajouté qu’en ce sens, la fonction de juger exige une compétence professionnelle irréprochable, une mise à jour constante et un dépassement de soi, toutes qualités requises pour administrer une bonne Justice. « Le Magistrat doit, ce faisant, bénéficier de formation continue telle que prévue par l'article 19 du statut de la Magistrature », a poursuivi le Garde des Sceaux qui a expliqué qu’en effet, la formation est un soutien indispensable à l'exercice de fonctions juridictionnelles car elle participe à une justice de qualité et accompagne les pratiques professionnelles des magistrats en leur permettant de renforcer leurs compétences techniques et de se spécialiser tout au long de leur vie professionnelle. Cependant, a-t-il reconnu, la jeunesse de l’Ecole de Formation Judiciaire (EFJN) et les contraintes budgétaires n'ont pas permis de satisfaire à cette exigence légale. « Je suis heureux et me félicite de constater que la plus haute juridiction de l’ordre judicaire nigérien, J’ai nommée la Cour de Cassation, a pris l’heureuse initiative de renforcer les capacités des juges d‘instruction, afin d’améliorer leurs performances », s’est de ce fait réjouit le ministre Mohamed Abdoulaye.
Abordant le présent séminaire de formation qui concernera les juges d’instruction, le ministre de la Justice a rappelé que, «le juge d’instruction est un magistrat du siège du tribunal chargé de procéder a instruction préparatoire et faire suite au réquisitoire introductif l’ayant saisi ». Pour le Garde des Sceaux, « le juges d’instruction est en réalité le gardien des libertés » et, c’est pourquoi, a-t-il indiqué, la Cour de Cassation dans le cadre de cette première activité de formation a choisi le juge d’instruction en raison du rôle qu’il joue dans la sauvegarde des libertés individuelles.
Le ministre de la justice a émis le souhait que l’atelier de formation permettra de consolider davantage les connaissances acquises et a émis le souhait qu’elles fassent, l'objet, de votre part, d’application immédiate dans l’exercice de vos fonctions. « J'espère qu’il en résultera indubitablement une meilleure gestion des cabinets d'instruction et corrélativement l’abandon des détentions anormalement longues, que l’opinion a de façon récurrente, critiquée », a déclaré le ministre Ikta Mohamed Abdoulaye pour qui, « c’est a ce prix que la confiance avec le justiciable sera restaurée ».
Enfin, le ministre s’est réjouit de savoir que le processus de renforcement des capacités des magistrats du fond initié dans le cadre de ce partenariat entre la Cour de Cassation et le projet ADALCI concernera à terme deux-cent (200) juges. « D’ores et déjà, vous pouvez compter sur ma détermination à continuer sans relâche à travailler avec votre institution pour le rayonnement de la justice nigérienne », a assuré le ministre de la Justice et Garde des Sceaux qui a saisi l’occasion pour réitérer les sincères remerciements du gouvernement à l’endroit de l'USAID, qui finance cet atelier et a exprimé ses « ses souhaits ardents de voir ce partenariat prendre beaucoup d’ampleur car le renforcement des capacités des acteurs de la justice constitue une priorité pour le Président de la République, Chef de Etat, Président du Conseil Supérieur de la Magistrature ».
Après la cérémonie solennelle d’ouverture, les travaux de l’atelier ont débuté. Durant les trois jours qu’ils dureront, les participants vont plancher sur des thématiques aussi importantes que variées, notamment la présentation générale de l’instruction préparatoire, l’administration des cabinets d’instruction préparatoire, l’administration des cabinets d’instruction, la détention préventive et surtout le contrôle de cette dernière, la surveillance et la clôture de l’instruction préparatoire et le contrôle par la chambre d’accusation. Les sessions de formation sont assurées par de hauts magistrats de la Cour de Cassation et seront accompagnés d’échanges et de discussions sur la réalité, les défis et contraintes des juges et cabinets d’instruction. Des recommandations et résolutions seront adoptées à la fin de l’atelier et viseront à accompagner la réforme et la modernisation du système judiciaire pour, in fine, améliorer son éfficaicté conformément aux objectifs du Projet ADALCI qui s’alignent sur ceux des autorités, des citoyens et des USA, partenaire historique du Niger.
Mamane Adamou (actuniger.com)
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