Diffa : malgré la persistance des défis, la scolarisation des jeunes filles gagne du terrain grâce à l’approche communautaire pour l’éducation (Reportage)
Au Niger, les efforts mis en œuvre par le gouvernement et ses différents partenaires techniques et financiers ont permis d’améliorer significativement ces dernières années, les indicateurs en matière d’accès à l’éducation des enfants et plus particulièrement la scolarisation des jeunes filles. Malgré ces avancées, les défis persistent en raison de la conjugaison de plusieurs facteurs socioéconomiques et culturels. Dans la région de Diffa, ces défis ont été amplifiés depuis 2015 par les répercussions de la double crise sécuritaire et humanitaire qui sévit dans le bassin du Lac Tchad. Afin de faire face à la situation, l’UNICEF met en œuvre grâce à un financement du gouvernement canadien, une nouvelle Approche Communautaire pour l’Education, qui a permis d’enregistrer des résultats concrets et probants sur le terrain avec plus de filles scolarisées. Cette démarche innovante se base en effet sur l’engagement des communautés et l’accompagnement des services déconcentrés et des collectivités locales pour permettre à chaque enfant de jouir de son droit à l’éducation. Reportage à Awardi, une localité de la commune de Diffa où s’est rendu notre envoyé spécial.
Il y a quelques années, Awardi est un petit village situé à quelques kilomètres de Diffa, chef-lieu de cette région située à l’extrême sud-est du Niger, et ne comptait que moins de 1000 habitants. Depuis 2015, la situation sécuritaire qui a affecté la région avec la multiplication des attaques de Boko Haram a fait de la paisible localité, un grand camp de réfugiés pour la plus part des nigérians mais aussi un important site pour les déplacés internes qui fuient les violences terroristes. Aujourd’hui, Awardi est pratiquement un quartier périphérique de Diffa où s’étalent à perte de vue, des tentes et habitations de fortunes qui abritent les populations locales ainsi que les réfugiés et les déplacés venues des villages et hameaux voisins. Cette situation a amplifié les défis humanitaires et a impacté la vie socioéconomique des habitants du village dont le nombre en été multiplié par dix en moins de quelques années alors que les populations faisaient déjà face à des difficultés d’accès aux services sociaux de base notamment l’eau, la santé et l’éducation.
Village péri-urbain de la commune de Diffa, Awardi comptait jusqu’en 2012, une population de 781 personnes avant les premières attaques des groupes armés non étatiques survenues en 2015. Aujourd’hui, c’es un important site pour les refugiés et les déplacés internes qui compte au mois de janvier 2020, une population déplacée de 9.225 personnes.
Avant la crise sécuritaire, le village ne comptait qu’une seule école avec quelques classes comme c’est le cas un peu partout en milieu rural au Niger. Mais l’afflux des réfugiés et des déplacés internes a fait augmenter les effectifs ainsi que les besoins surtout en matière d’éducation afin d’accueillir les élèves d’autres écoles. Grâce à l’appui des partenaires techniques et financiers, notamment l’UNICEF, de nouvelles classes ont été construites et équipées pour accueillir les nouveaux arrivants car l’autre défi majeur pour l’Etat et ses partenaires, c’est de faire en sorte que la double crise sécuritaire et humanitaire n’affecte pas les résultats enregistrés ces dix dernières années en matière d'éducation et particulièrement pour ce qui est de la scolarisation de la jeune fille, un défi et une priorité nationale.
Des avancées significatives et des défis persistants en matière d’éducation
Bien que la situation soit plu tendue à Diffa en raison de la double crise sécuritaire et humanitaire, elle illustre le contexte national en matière d’éducation ainsi que les obstacles qui persistent en matière d’accès à l’école. Au Niger, pouvoir aller à l’école est certes aujourd’hui devenu une réalité pour beaucoup d’enfants et les opportunités offertes aux filles continuent de s’élargir leur permettant de libérer leur potentiel comme en témoignent beaucoup d’exemples en la matière. D’importantes avancées ont été réalisées au cours des dernières années en faveur de l’éducation des filles, dont entre autres, la signature par le gouvernement des dix (10) engagements en faveur de la scolarisation des filles, celle du décret portant protection, soutien et accompagnement de la jeune fille en cours de scolarité et des décrets d’applications, l’élaboration de la Stratégie Nationale pour l’Accélération de l’Education et de la Formation des Filles et des femmes (SNAEFFF) et du programme Transitoire pour l’Education et la Formation Professionnelle (PTSEF).
Malgré ces avancées, le pays continue de faire face à un certain nombre de défis. Ainsi, plus de 2,6 millions d’enfants âgés de 7 à 16 ans sont déscolarisés ou non scolarisés au Niger et les données officielles montrent que le phénomène est plus élevé chez les filles (56,3%) que chez les garçons (50,1%). Une récente enquête conduite par le ministère des enseignements primaires en vue du récensement des enfants en âge d’aller à l’école dans 35 communes, a révélé que plus de 53.000 enfants dont 31.000 filles (soit 58%) ne le sont pas. Plus en détails, les statistiques officielles font ressortir qu’un garçon en milieu urbain a trois fois plus de chance d’être scolarisé comparé à une fille en milieu rurale et l’indice de parité Fille/garçon de TBS au primaire est de 0.9 et de 0.7 au secondaire en 2017 selon les résultats du rapport d’analyse 2018 de «l’ Etude sur les enfants et les adolescents en dehors de l’école (EADE) » réalisée par le ministère de l’Education nationale. Le taux de scolarisation dans le 1er cycle de l’enseignement reste particulièrement faible, avec seulement 17% des filles qui achèvent le cycle.
Ces chiffres montrent la complexité de la scolarisation et de l’exclusion au Niger. Avec la forte pression démographique, le nombre d’enfants en âge scolaire continuera à augmenter. L’indice de parité genre est déjà parmi les plus faibles au monde tandis que l’écart entre les pauvres et les riches s’est aggravé ces dernières années. Malheureusement les centres d’éducation alternative ou d’éducation non formelles ne sont pas bien connus ou vulgarisés, et n’ont pas actuellement la capacité d’accueillir tous les enfants non-scolarisés ou déscolarisés. Sur tout un autre plan, la préparation des enfants avant leur entrée dans le cycle primaire n’a pas connu de progrès significatif comme en atteste le taux de préscolarisation qui est demeuré faible. Aussi, les bénéfices liés au développement préscolaire ne sont pas bien connus par les communautés locales, et de ce fait l’exclusion de plus de 90% des enfants, qui ont raté une occasion critique pour leur développement, mérite plus d’attention et d’investissement. Tout ce contexte montre la nécessité pour l’Etat de faire des choix de priorisation difficile tant les défis sont multiples et les moyens parfois limités.
L’approche communautaire, une démarche innovante pour améliorer l’Education
De l’analyse causale des différentes études ainsi que des conclusions tirées, il ressort que cette situation s’explique par une conjugaison de facteurs et de pesanteurs socioéconomiques et culturels. Beaucoup de parents ne perçoivent pas encore l’importance de l’école puisque les enfants n’acquièrent qu’un faible niveau de connaissances et de compétences au terme de leur cycle de scolarité primaire et son souvent renvoyés même lorsqu’ils accèdent au premier cycle du secondaire. Ils trouvent également que les coûts d’opportunité de l’école sont élevés. En plus, les parents refusent de scolariser les enfants parce qu’ils sont en proie à plusieurs formes de violence à l’école et sur le chemin de l’école, chemin parfois distant du domicile familial notamment pour les établissements d’enseignement secondaire (les collèges). Aussi, les parents utilisent les enfants dans les travaux domestiques, la conduite des troupeaux et les travaux champêtres. Certains parents marient précocement leurs filles pour se conformer aux normes sociales.
Dans certaines régions du pays, comme c’est le cas à Diffa, avec l’impact des attaques de Boko Haram dans le bassin du Lac Tchad ou à Tillabéri avec l’impact du conflit malien, la situation sécuritaire et la récurrence de certains phénomènes naturels (inondations et sécheresse), amplifient ces défis. Dans ces zones qui vivent des situations d’urgence depuis quelques années, beaucoup de parents craignent pour la sécurité de leurs enfants avec la multiplication des enlèvements surtout des jeunes filles et la destruction des classes et écoles. En plus, du fait de la persistance des conflits et des menaces sécuritaires, les enfants ont du mal à accéder à leurs droits à l’éducation pour des familles qui doivent faire face à des défis supplémentaires parfois imprévisibles.
C’est pour faire face à cette situation, que l’UNICEF avec l’appui de ses partenaires soutient le système d’Approche Communautaire pour l’Education. Il s’agit d’une démarche innovante basée sur l’engagement et l’action des communautés avec le soutien et l’accompagnement des services au niveau déconcentré et les collectivités territoriales. Cette stratégie qui permet de faire des échanges, de concertation et de prise d’engagements entre les différents acteurs du développement de l’éducation au niveau communautaire, à travers les Comités de Gestion d’Etablissements Scolaires (CGDES) et les Associations des Mères Educatives (AME). Ainsi, par cette approche, « les engagements pris par les communautés aborderont des thématiques en lien avec la scolarisation des filles, le mariage des enfants, les normes sociales, la difficulté du maintien des filles à l’école qu’il s’agisse des filles déscolarisées ou non scolarisées ». Pour plus d’efficacité, le processus est mis en œuvre à travers une démarche inclusive et communautaire pilotée par et pour les communautés comme il a été constaté à Awardi au cours d’une visite de la presse, début novembre, pour s’imprégner de la situation sur le terrain.
Dans la région de Diffa, l’UNICEF enregistre des résultats probants grâce au soutien du gouvernement canadien
A l’école primaire d’Awardi, en cette dernière journée de la première semaine du mois de novembre, les élèves sont déjà en classe lorsque nous débarquons sur le site de l’école. L’école primaire est composée d’une quinzaine de classes pour la plupart construites par des partenaires et l’une des premières surprises, c’est que contrairement à beaucoup d’autres écoles traversées dans le reste du pays et en dépit des risques et des mesures prises par les autorités, les mesures contre la pandémie du Covid-19 sont ici relativement respectées. Devant chaque classe, est installé un dispositif de lavage de mains avec eau et savon, un don de l’UNICEF, et les élèves ainsi que les enseignantes, respectent bien le lavage des mains avant d’entrer en classe.
Dans un coin de l’école, qui souffre d’un manque de clôture, les membres du CGDES échangent sur la réhabilitation d’une classe en paillote qui a été endommagée par les dernières intempéries.
L’Approche Communautaire pou l’Education mise en œuvre par l‘UNICEF grâce au soutien financier du Canada dans la région de Diffa a permis d’enregistrer des résultats concrets en matière de scolarisation des enfants et du maintien à l’école des jeunes filles. Dans certaines classes de l’école primaire d’Awardi, les filles représentent plus de 80% de l’effectif.
La Directrice de l’école, Mme Fanna Mani, est toute enthousiaste de nous accueillir. Sur les 900 et quelques élèves que comptent l’école, plus de la moitié, soit 527, sont des filles et dans certaines classes, l’effectif est composé de plus de 80% d’élèves de sexe féminin. Malgré l’afflux des réfugiés et des déplacés qui a rehaussé celui des élèves, les cours se déroulent bien et comme le confirme la directrice, « ces dernières années, de plus en plus de filles sont inscrites à l’école et d’autres qui ont abandonnées pendant un temps pour diverses raisons, sont en train d’être récupérées à travers les classes dites passerelles ». Les « classes passerelles » sont des classes de récupération d’élèves ayant abandonné un temps l’école avant sa réintégration dans le circuit normal. Il s’agit d’initiatives financées en grande partie par les partenaires qui permettent de mettre à niveau les enfants déscolarisées afin qu’ils puissent par la suite réintégrer le cycle formel. Elle en profite d’ailleurs pour soumettre quelques doléances à l’Etat et à ses partenaires afin d’améliorer le cadre de vie des élèves et des encadrants notamment la clôture de l’école, la construction et l’équipement de nouvelles classes pour absorber le surplus d’élèves qui ne cessent d’augmenter en raison de la persistance de la situation sécuritaire et humanitaire, ainsi que la mise en place d’une véritable cantine scolaire.
Madame Fanna Mani, Directrice de l’école primaire d’Awardi. Sur un effectif de 900 et quelques élèves, 527 sont des filles.
L’école d’Awardi comme des autres localités de la zone de conflit est un exemple illustratif de la réussite de l’Approche Communautaire pour l’Education et particulièrement la scolarisation des jeunes filles. Dans la majorité des classes, le nombre des filles excèdent celui des garçons grâce à la sensibilisation des parents sur l’importance de la scolarisation des jeunes filles et surtout aussi, leur maintien à l’école jusqu’à la fin de leur cycle ou l’obtention d’un diplôme. Le mécanisme mis en place marche bien avec d’une part l’Etat à travers les services de la scolarisation des filles au niveau des directions régionales et départementales de l’éducation primaire, le service régional de Protection de l’Enfant, et d’autre part, les communautés avec le Comité de gestion des établissements scolaires (CGDES), l’Association des Parents d’élèves et celle des mères éducations (AME). Grâce aux actions conjointes, de plus en plus de filles sont inscrites à l’école et les cas de mariage forcé conduisant à l’abandon scolaire sont de plus en plus rares chez les jeunes filles. «L’année passée nous avons enregistré deux cas de mariages. L’un a été consommé et l’autre avec l’intervention du CDGES et de l’Association des Parents d’Elèves, le processus a volé en éclat. Et même celle dont le mariage a été consommée, elle est actuellement dans cette classe de CM2 », fait savoir Mme Fanna qui a ajouté aussitôt que ces cas ont exclusivement concernés les élèves déplacés venus des localités voisines de Baruwa et Kijandji. Comparé à la situation dans un récent passé, c’est une nette amélioration de la situation et au niveau de l’école d’hôte d’Awardi, tous les acteurs impliqués s’activent pour que «ces cas qui font tâche d’huile sur les résultats de l’école ne se répètent plus », comme le souligne M. Gagara, un des enseignants de l’école qui encadre justement une des filles qui a été sauvé du mariage. C’est par lui d’ailleurs que le mécanisme de prévention s’est mis en branle et a permis de sauver la jeune Yagana, 14 ans, d’un mariage certain. « Des que nous avons eu l’écho de ce projet de mariage, nous avons remonté l’information à la hiérarchie et les parents d’élèves avec les membres du CGDES ont pris le relais pour aller rencontrer les parents de la jeune fille et les sensibiliser. Ils ont finalement accepté de surseoir au mariage et la fille a pu réintégrer l’école ». Aujourd’hui, elle est en classe de CM2 et prépare son examen et d’après son maitre, « c’est une fille très appliquée dans les études et qui a beaucoup de chances de réussir ». Lors de la visite, nous avons trouvé Melle Yagana en plein cours avec les autres élèves. Très contente d’avoir échappé à un destin incertain et consciente de la chance qu’elle a eu, elle pense désormais à son avenir : « c’est grâce à l’intervention des uns et des autres, le projet de mariage que mes parents ont pour moi a été finalement brisé. Aujourd’hui, je continue à fréquenter l’école, dans l'espoir d'être aussi une enseignante », nous confie-t-elle.
A 15 ans et en classe de CE2 aujourd’hui, après une classe passerelle, Melle Yakori n’a pas eu cette chance. Son mariage à elle a été déjà consommée et c’est suite à son abandon de l’école que l’information a fuité jusqu’à remonter au niveau central à Niamey. C’est par la suite que le mécanisme d’alerte a été activé pour lui permettre de réintégrer l’école. Le président du CDGES de l’école d’Awaridi, M. Maman Tahirou, que nous avons trouvé sur place explique comment la situation a pu être décantée avec la collaboration des autres acteurs et membres de la communauté. « Nous, on pensait que la fille a même abandonné l’école. Il a fallu que l’information nous parvienne de Niamey pour qu’on sache que la jeune fille a été mariée. Nous sommes allés donc trouver ses parents et leur expliquer le problème qui s’est soulevé au niveau de l’école à cause de leur fille ainsi que les conséquences pour son avenir et les risques pour sa vie surtout au regard de son très jeune âge. Ils se sont montrés très compréhensif et ont accepté que leur fille retourne à l’école et fort heureusement, même le mari a donné son accord pour que sa femme continue ses études ». Débordante de joie lorsque nous la rencontrons dans la cours de l’école pendant la recréation, la jeune fille s’est fait à son sort mais n’entend point désormais laisser les études : « même étant mariée, je continue à fréquenter l'école grâce à l'intervention des parents d'élèves et du CDGES, qui ont lutté pour que je sois dans mon droit, qui est celui d'aller à l'école. Mes parents ainsi que mon mari ont bien compris le message, d'autant plus que c'est eux même qui m'encourage aujourd’hui à poursuivre mes études et mon rêve est de devenir enseignante aussi », nous a-t-elle déclaré, toute souriante.
Mariée à 15 ans, Yakori a repris le chemin de l’école avec l’accord de sa famille et de son mari grâce aux actions de médiation et de sensibilisation entreprises par les parents d’élèves et l Comité de gestion local. Elle rêve désormais de devenir enseignante pour servir sa communauté.
La sensibilisation des communautés par les communautés pour donner sa chance à chaque enfant
« Nous allons continuer la sensibilisation pour éviter que des choses comme ça ne se répètent plus », insiste M. Tahirou, le président du CDGES, qui souligne que grâce à la sensibilisation en amont, beaucoup de cas similaires ont pu être évitée et c’est une démarche qu’il convient de renforcer pour éviter d’autres mariages de jeunes filles ou abandon d’école. Avec la sensibilisation, le mariage de la jeune Yakori aurait pu être certainement évité comme en atteste le témoignage de son père que nous avons par la suite trouvé à son domicile, fait d’objet de récupération comme c’est le cas pour beaucoup de familles de déplacés habitant sur le site. « Dans le temps, je ne savais rien des opportunités qu'offrent la scolarisation de la fille et je ne sais même pas que c’est puni par la loi et que le mariage à un si jeune âge peut avoir des conséquences sur la santé de ma fille. Cependant, avec les échanges que j’ai eus avec les parents d’élèves et les membres du comité chargé de la question, j'ai beaucoup appris sur l'importance de l’instruction des filles et de tout ce que cela peut apporter pour son bien, celui de sa famille ainsi que de la communauté. La scolarisation permet de lutter contre l'ignorance et la pauvreté et c’est pour ça, depuis cette regrettable mésaventure, je me suis engagé aux côtés de ma fille même étant déjà marié, afin qu'elle continue à étudier et que grâce à Dieu, elle soit aussi un jour quelque chose de bien pour notre communauté », concède, avec une dose d’amertume et de regret, le père de Yakori.
L’Approche Communautaire pour l’Education mise en œuvre par l’UNICEF grâce au financement canadien a permis d’enregistré de résultats satisfaisants en matière de scolarisation des jeunes filles à Diffa, une zone en conflit. Cependant, beaucoup reste à faire car les réalités socioéconomiques culturelles pèsent toujours beaucoup d’où l’importance de la sensibilisation et de l’appui aux communautés. C’est ce que nous a expliqué Mme Yacouba Bibata, point focal et chargée de la scolarisation de la jeune fille à la Direction Régionale de l’Enseignement Primaire (DREP) : «Dans les zones rurales isolées, nous avons un problème de maintien, parce que les filles n’achèvent pas de manière suffisante leur cycle normal. Il y a de nombreuses déperditions scolaires, ça touche généralement les filles. Quand elles arrivent au secondaire, le manque de tuteurs fait en sorte qu’elles retournent dans leurs familles. Il y a des familles qui sont à leur 5ème déplacement. Comme vous le savez dans notre culture quand tu as 4 à 5 filles, tu ne vas pas les trimbaler de village en village. Il faut les nourrir et les habiller. Vraiment, c’est tout ça qui accentue le problème du maintien des jeunes filles à l’école».
Mme Yacouba Bibata, point focal et chargée de la scolarisation de la jeune fille à la Direction Régionale de l’Enseignement Primaire (DREP).
De son coté, Mme Mahamadou Fati Garba, chargée de la gestion des cas et des campagnes pour un changement de comportement à la Direction départementale de la Protection de la Femme et de la Protection de l’Enfant de Diffa, rappelle que certes la question de mariage des enfants dans la région est récurrente mais les actions menées de concert avec les autres partenaires et les communautés ont permis d’améliorer la situation avec des résultats concrets sur le terrain. «Nous rencontrons des cas d’enfants et en particulier de jeunes filles qui sont menacés de mariage, elles sont environ une vingtaine à la date d’aujourd’hui. Dans ce cadre-là, on sensibilise les parents pour qu’ils donnent la chance aux enfants de continuer leurs études », rapporte Mme Mahamadou Fati Garba, qui souligne dans la plupart des cas, la sensibilisation porte ses fruits et permet de sauver des vies.
Mme Mahamadou Fati Garba, de la Direction départementale de la Protection de la Femme et de la Protection de l’Enfant de Diffa.
A Awardi et dans les autres localités concernées par le projet, les résultats enregistrés grâce à la mise en œuvre de l’Approche Communautaire pour l’Education sont visibles. L’une des principales leçons qui méritent d’être mise en évidence, c’es que la sensibilisation à travers une démarche communautaire et inclusive permet d’atteindre des résultats concrets en matière d’’amélioration du taux de fréquentation de l’école par les enfants et surtout les jeunes filles. La sensibilisation constitue de ce fait, le premier moyen de renforcer la scolarisation des enfants et la meilleure arme pour prémunir les jeunes filles contre les mariages forcés et l’abandon scolaire. Les défis sont cependant tellement immenses dans le pays, qu’il urge de renforcer et de généraliser ces initiatives même dans les zones hors conflit, pour donner la chance à tout les enfants et en particulier à toutes les jeunes filles, d’aller à l’école : c’est leur droit !
Ikali Dan Hadiza, envoyé spécial à Diffa (actuniger.com)