Assemblée nationale : discours du président Ousseini Tinni à la clôture de la session budgétaire
Discours de SEM OUSSEINI TINNI à l’occasion de la clôture de la 2ère Session ordinaire de l’Assemblée nationale au titre de l’année 2018
Excellence Monsieur le Premier Ministre, Chef du Gouvernement,
Monsieur le Haut Représentant du Chef de l’État,
Mesdames et Messieurs les Présidents des Institutions de la République ;
Monsieur le Grand chancelier des ordres nationaux,
Mesdames et Messieurs les membres du Gouvernement ;
Excellences Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs et Représentants des Organisations internationales ;
Honorables collègues Députés ;
Monsieur le Gouverneur de la Région de Niamey ;
Monsieur le Président de la Délégation spéciale de Niamey ;
Honorables Chefs traditionnels et Chef religieux ;
Mesdames et Messieurs ;
Par la grâce de Dieu, le Tout miséricordieux, nous voici au terme de cette session si importante pour notre pays et ses citoyens en raison des enjeux dont est porteur son ordre du jour principal. Nous nous devons de remercier le Tout puissant pour le calme et la sérénité qui ont caractérisé son déroulement. Calme et sérénité qui, pour autant, ne sauraient occulter la charge de travail qui fut celle des députés, des membres du Gouvernement et des fonctionnaires de tous ordres.
Au regard du résultat final de tous ces efforts, la Représentation nationale en sait gré à tous ; par ma voix, elle tient à remercier le Gouvernement pour l’assiduité de ses membres dans les commissions comme en plénière. Elle remercie tout particulièrement leurs collaborateurs qui avaient pris quartier à la Commission des Finances et du Budget, cheville ouvrière de l’examen de la loi de finances.
Chers collègues, nous avons donc, tous ensemble, fait œuvre utile en dotant notre pays d’un budget techniquement élaboré base zéro. En effet, il me semble que tenant compte de tous les paramètres en notre connaissance, il s’agit du budget qu’il faut, il s’agit des meilleures prévisions que nous puissions arrêter au regard des données en notre disposition et surtout au regard de l’ancrage qui est le sien. Il faut, en effet, se souvenir que ce budget procède du Plan de Développement Economique et Social auquel, nous avions, en son temps, donné notre assentiment.
Nous avons aussi massivement adopté ce budget en raison des grandes ambitions dont il est porteur.
Il s’agit notamment des objectifs d’amélioration de la croissance économique des revenus moyens, de satisfaction des besoins fondamentaux, de renforcement des capacités humaines et de réduction de la pauvreté.
N’est-ce pas là ce qui fait la motivation de notre combat à tous pour faire avancer notre pays et préparer progressivement les conditions de son émergence ? N’est-ce pas là l’essentiel des programmes politiques de tous ceux qui aspirent à diriger ce pays ? N’est-ce pas ainsi résumées les aspirations communes de nos concitoyens ?
C’est vous dire, distingués invités, que l’ambition de ce budget transcende idéologies et clivages politiques. Il est fait de recettes qu’il nous faut tous contribuer à mobiliser, il est fait de dépenses incontournables pour le maintien de notre pays dans sa souveraineté et dans sa capacité à préparer l’avenir de ses enfants.
C’est pourquoi, en matière de recettes, nous ne pouvons qu’encourager et soutenir la volonté du Gouvernement d’’élargir l’assiette fiscale, de moderniser la gestion de l’impôt et des administrations fiscale. Il faut le faire encore avec beaucoup plus d’engagement car, en dépit des efforts louables des services fiscaux, la projection de la pression fiscale, aux alentours de 15%, reste encore loin de l’objectif de 21% dont je parlais il y a un an. Des efforts doivent encore être consentis pour persuader davantage ceux qui arrivent encore à se faufiler à travers les mailles du filet fiscal, les persuader, dis-je, à s’acquitter de leurs contributions conformément à la loi.
Il faut ainsi continuer à rechercher ces niches fiscales qui sont autant de manques à gagner pour le trésor public, j’allais dire autant de freins à la modernisation de notre pays.
En matière de dépenses, nous partageons le souci du gouvernement de parvenir à plus de rationalité à travers notamment la modernisation de tous les rouages de la chaîne de dépenses.
En définitive, nous avons adopté un budget sur lequel nous fondons beaucoup d’espoir en termes d’amélioration de la vie quotidienne de nos concitoyens, en termes de sécurisation de notre pays, en termes de préparation de l’avenir. Nous souhaitons que le Gouvernement dispose des meilleures conditions possibles pour l’exécuter à la hauteur des objectifs qui lui sont assignés. Cependant, acte de prévision, nous savons que le budget reste toujours immergé dans l’environnement de son exécution. Espérons donc que cet environnement nous soit propice, avec une production agricole excédentaire, des aléas exogènes maîtrisables, la crise sécuritaire endiguée…
Par-dessus tout, cultivons la paix intérieure. Evitons de perturber inutilement la vie économique et sociale par des mouvements sociaux lorsque dialogues et débats sereins peuvent nous permettre d’aplanir nos différends. Comme chacun le sait, le consensus, si cher à l’un de mes prédécesseurs à ce perchoir, n’est pas anti démocratique !
Distingués invités, au cours de la session qui s’achève, parallèlement à l’examen du budget, notre institution a également exercé ses autres prérogatives, qu’il s’agisse du contrôle de l’action gouvernementale, de l’examen de certaines lois générales ou de la diplomatie parlementaire.
En matière de contrôle de l’action gouvernementale, nous nous félicitons de l’acclimatation progressive des députés comme des membres du Gouvernement à la nouvelle procédure applicable aux questions d’actualité dont les séances sont de plus en plus suivies par nos compatriotes grâce à l’aide inestimable des médias d’Etat et de la presse privée.
S’agissant de diplomatie parlementaire, nos succès auront été d’importance ! Et, en l’occurrence, pour employer, une expression à la mode, je dirai que nous surfons sur la vague de crédibilité que SEM ISSOUFOU MAHAMADOU confère quotidiennement à notre pays. Ainsi, comme vous l’aviez appris, nous avons réussi brillamment à placer un de nos compatriotes au Secrétariat général de l’Union Parlementaire Africaine.
A cet égard, je voudrais profiter de la présente cérémonie pour remercier et féliciter le groupe nigérien de l’Union Parlementaire Africaine qui, soudé comme un seul homme, a fait bloc pour battre campagne sans autres moyens que leur force de conviction. Il me semble que leur exemple doit nous inspirer : chaque fois que l’enjeu est national, il faut se retrouver, majorité et opposition, pour mutualiser les efforts et vaincre ! Si nous l’avons fait à Abuja, nous pouvons le faire face à tous les défis, sécuritaires, économiques ou environnementaux.
Distingués invités, l’autre succès diplomatique est lié à la récente réunion de Paris autour du mécanisme de compagnonnage parlementaire du G5 Sahel, réunion conjointement organisée par l’Assemblée nationale française et notre Représentation nationale. Il y avait, en plus du Président Richard Ferrand et des cinq présidents des parlements des pays du G5 Sahel, le Président du Parlement italien et des représentants des pays et partenaires de l’Alliance Sahel. La réunion après avoir examiné toutes les questions liées aux terrorismes et au développement, a adopté les statuts du comité interparlementaire G5 Sahel-Alliance Sahel, statuts fixant le siège du comité à Niamey.
Il s’agit là de l’aboutissement d’un long processus initié par les Présidents ISSOUFOU MAHAMADOU et EMMANUEL MACRON lors de la dernière visite du Président français au Niger.
Le souci des deux dirigeants, que devaient plus tard partager les cinq présidents d’assemblée des pays du sahel, est de faire accompagner par les représentants du peuple la construction du G5 Sahel, expérience unique de réponse aux défis du terrorisme par des moyens autant sécuritaires qu’économiques. Les enjeux du développement du G5 Sahel sont si importants qu’il était devenu incontournable de le faire accompagner par un organe de contrôle démocratique. Il s’agit ce faisant de rassurer les populations que le Comité Interparlementaire G5 Sahel n’est pas une organisation bureaucratique. Les parlementaires s’y impliquent afin que tous les acteurs se persuadent davantage du sérieux attaché à sa construction.
Cette structure reste d’essence consultative, en outre elle contribuera à l’appropriation des objectifs du G5 Sahel par toutes les populations sahéliennes notamment ceux relatifs à la pédagogie de la paix et de la défense des droits de l’homme.
Distingués invités, s’agissant toujours du G5 Sahel, nos populations s’impatientent du retour définitif à la paix même si, pour ce qui est du Niger, notre territoire est entièrement sous contrôle de nos Forces de Défense et de Sécurité. A cet égard, au nom de la Représentation nationale, tout en exhortant nos partenaires au développement à concrétiser leurs promesses d’appui, je salue la décision de nos Etats d’allouer, chacun, treize milliards de FCFA par an à l’effort de sécurité régional. Pour autant, notre Représentation nationale comme celles des quatre autres pays du Sahel, continue à souhaiter que la force conjointe du G5 Sahel soit admise sous le chapitre 7 des Nations-Unies.
Distingués invités, l’évocation du G5 Sahel m’amène à l’esprit les fâcheuses conséquences du terrorisme dans notre pays. Comment ne pas ainsi avoir une pensée émue au souvenir de toutes ces femmes et jeunes filles enlevées à l’affection des leurs à Ngaléwa et aux environs de Toumour ? Comment ne pas s’offusquer de ces assassinats indistincts frappant aux confins du Lac Tchad comme à notre frontière occidentale ?
Nous savons que le Gouvernement et les Forces de Défense et de Sécurité font de tout leur mieux ; mais, comme Représentation nationale, nous nous devons de leur demander encore plus d’efforts même si, par ailleurs, nous savons que la guerre contre le terrorisme est une guerre d’usure, une guerre de guérilla avec ce que cela comporte de cynisme et de sournoiserie. Celle-là est encore plus dangereuse en cela que son champ de bataille dépasse les frontières d’un seul pays.
Elle est d’autant plus dangereuse qu’aujourd’hui, les terroristes poussent le cynisme à un degré encore plus élevé en se faisant de l’ethnocentrisme et du racisme des alliés objectifs. Ainsi, appliquant le vieil adage qui consiste à diviser pour mieux régner, les terroristes exacerbent les malentendus intercommunautaires pour pousser à la guerre civile dans certains pays de notre voisinage. A l’heure actuelle, dans ces pays, le délit de faciès conduit, par endroit, à d’ignobles massacres ! Des communautés qui, naguère cohabitaient en bonne intelligence, s’affrontent sauvagement aujourd’hui.
Chers concitoyens, je sais que nous ne tomberons pas dans ce piège car nous sommes conscients que la haine d’autrui, en sa personne, ne doit jamais être mise en avant pour justifier la remise en cause de l’ordre établi.
On l’a dit et répété, au Niger, il y a plus de raisons qui nous unissent que de celles qui nous séparent. Je ne parlerai donc ni de religion, ni de conditions de vie identiques ici et là, ni d’histoire, ni de culture communes. Je parlerai d’un avenir de paix et de prospérité qui est à notre portée, pourvu que nous nous battions ensemble pour transformer nos richesses potentielles en réalités économiques. Comme vous le savez, chers concitoyens, en dépits de certaines statistiques aussi têtues qu’incompréhensibles, notre pays fait partie des plus prometteurs de la sous-région ; chaque jour, des raisons d’espérer s’imposent à nos esprits. Battons-nous donc ensemble, chacun avec les moyens qui sont les siens, aux côtés de nos FDS, pour vaincre les terroristes et mieux mettre en valeur notre pays.
Je reste confiant qu’aucune des communautés nigériennes ne se laissera divertir par le chant des sirènes des organisations terroristes dont nul ne connaît ni les objectifs ni les commanditaires !
Distingués invités, chers collègues, sur tout un autre registre, Je voudrais revenir sur les récentes festivités qui se sont déroulées à Zinder.
A cet égard, je remercie sincèrement les populations de Zinder, de la ville comme de la région pour leur enthousiasme communicatif qui a contribué au succès de ces retrouvailles nationales. La fête fut belle, les réjouissances à la mesure de l’évènement. Zinder, métamorphosée par le travail acharné de ses enfants s’était montrée sous son meilleur jour pour honorer ses hôtes d’ici et d’ailleurs. Ils en sont tous repartis satisfaits avec d’inoubliables souvenirs de cette chaleureuse hospitalité toute zindéroise !
Cependant, distingués invités, que la fête, parce que fort réussie, ne nous fasse pas oublier son objet !
Cet objet, c’est la République, concept auquel est attachée une philosophie des plus exigeantes. Aussi voudrais-je qu’après soixante ans de vivre ensemble l’on se remette à l’esprit ces exigences comme celle de l’appel permanent à la vertu, MOUTOUNTCHI, IMANI, BOURKINATRAY.
En effet, sans la vertu, valeur cardinale dans le type de régime qui est le nôtre, l’édifice républicain ne peut tenir debout. Pour rappel, la République présuppose une dévolution du pouvoir selon un mécanisme de représentation des citoyens libres et conscients de leurs droits et devoirs. Il va sans dire qu’un tel système pour prospérer a besoin que représentés et représentants respectent un code de conduite des plus rigoureux.
Pour les représentés, l’obligation est une conduite citoyenne de tous les instants ; l’on doit, en tout instant, pouvoir répondre à l’appel du devoir, l’on se doit notamment de considérer le prochain comme un citoyen à part entière, sans voir en lui ni région, ni ethnie, ni religion pour notamment faire échec aux diviseurs dont j’ai parlé tantôt.
Chers Collègues, s’agissant des représentants que nous sommes, citoyens jouissant du privilège de décider pour tous pendant un temps déterminé, le devoir de vertu est encore plus grand ! Nous nous devons d’être irréprochables en tout point de vue, et dans le vécu public et dans ce qu’il est convenu d’appeler vie privée si tant est-il qu’un homme public puisse avoir de vie privée !
En effet, représenter, c’est agir en lieu et place du grand nombre ; dans ces conditions, l’agir bien est un impératif ; c’est le corollaire de l’obéissance des autres citoyens. C’est certainement dans cet ordre d’idées que SEM ISSOUFOU MAHAMADOU, parlant du peuple, déclarait en avril 2011, je cite : ‘’il attend de moi que je me comporte en serviteur et non en maître. Il attend de moi la défense de l'intérêt général. Celui-ci sera ma boussole pour m'orienter dans la forêt des intérêts particuliers, il sera mon fil conducteur dans un monde où l'égoïsme est roi, dans un monde où chacun ne cherche qu'à tirer son épingle du jeu’’ fin de citation.
L’agir bien implique également le devoir de compte rendu aux citoyens C’est dans ce cadre que notre législature s’efforce depuis trois ans à sortir des sentiers battus dans ses missions législatives, dans le cadre du contrôle de l’action gouvernementale comme dans sa mission de représentation.
S’agissant de cette dernière prérogative, nous avons souhaité donner la priorité aux contacts directs avec la population sur les déplacements à l’étranger notamment pour les raisons que j’ai évoquées tantôt.
Ainsi, notre ambition dans le cadre du budget qui vient d’être voté est de dépêcher des missions à travers l’ensemble du pays pour porter diverses thématiques qui vont du développement rural à la sécurité en passant par l’action sociale de l’Etat et les investissements en matière d’infrastructure. L’objectif que nous poursuivons est de rapprocher davantage les citoyens de leur Parlement afin d’éviter cette cassure qui, naguère faisait de l’Assemblée une citadelle fermée et inaccessible. Notre ambition est de faire progressivement du vote de la loi un processus participatif. La procédure parlementaire sera sans doute plus lourde, mais elle gagnera en adhésion populaire et la loi n’en sera que plus respectée.
A l’instar de l’Assemblée nationale qui s’efforce ainsi de remplir fidèlement la mission qui lui est confiée par nos concitoyens, je souhaite instamment que tous nos compatriotes exerçant une autorité découlant de notre architecture institutionnelle, au niveau politique comme administratif servent au mieux l’Etat, garantie de notre vivre ensemble. C’est la seule manière d’arriver à ce progrès qui nous mettra à l’abri des menaces des aventuriers de tout acabit qui convoitent notre territoire pour vivre leurs rêves aussi chimériques qu’effrayants.
Distingués invités, Mesdames et Messieurs,
Nous clôturons cette session au moment où les résultats de l’évaluation de la campagne agricole indiquent une production globalement excédentaire même si des poches de déficit sont signalées ici et là. A cet égard, je voudrais appeler tous nos compatriotes à la solidarité à l’endroit de ceux de nos concitoyens que la providence n’a pas favorisés cette année. En effet, avant d’en appeler à l’aide extérieur, nous nous devons de créer au niveau national un système d’entraide des zones excédentaires vers les poches déficitaires. C’est cela également l’esprit républicain.
Cependant, je reste confiant car, avec l’initiative 3 N, le spectre de la disette sera conjuré grâce à l’apport certain des cultures de contre saison, désormais entrées dans nos habitudes de vie.
Distingués invités, pour finir, il ne me reste plus qu’à remercier tous ceux qui ont permis à la présente session d’atteindre ses objectifs. Il s’agit d’abord des membres du Gouvernement qui ont sacrifié au rituel républicain de participation à nos débats, ensuite de la presse qui relaye ces débats avec professionnalisme et surtout des fonctionnaires parlementaires dont je salue le dévouement et l’efficacité.
En souhaitant que tous nos compatriotes continuent à cultiver l’esprit républicain, en toute circonstance, et que notre pays poursuive avec toujours plus de sérénité sa marche inexorable vers le progrès et le développement, je déclare close la deuxième session ordinaire de l’Assemblée nationale au titre de l’année 2018.
Vive la République,
Vive le Niger,
Je vous remercie, la séance est levée.