Qu’est-ce que le MNSD-NASSARA ira-t-il chercher chez Issoufou ?

Depuis quelques temps, des rumeurs persistantes font état d’un possible ralliement du Mouvement National pour la Société de Développement (MNSD-NASSARA) – actuellement deuxième force politique de l’opposition – à la mouvance présidentielle. Faute de toute réaction des instances qualifiées du parti, les analystes se tirent les cheveux à savoir si oui ou non le MNSD-NASSARA quittera bientôt l’opposition et si c’est la seconde hypothèse qui va se concrétiser, ce que le parti de Seïni Oumarou ira chercher dans le pouvoir de la Renaissance acte II.

Dans deux de ses parutions de la semaine dernière, le quotidien privé «L’Enquêteur» est largement revenu sur les rumeurs faisant état d’un possible ralliement du MNSD-NASSARA au camp du Président de la République Issoufou Mahamadou. Le journal a même parlé des offensives qu’entreprendraient dans ce sens des barons du Parti Nigérien pour la Démocratie et le Socialisme (PNDS-TARAYYA), le principal parti au pouvoir, en direction du MNSD-NASSARA. Mieux, «L’Enquêteur» a cité des noms de quelques responsables du parti de Seïni Oumarou, qui ferait des pieds et des mains pour accélérer et matérialiser le rapprochement avec le pouvoir. Mais faute de toute réaction du MNSD-NASSARA lui-même, pour confirmer ou infirmer ces rumeurs, il sera difficile de dire ce qui se passe réellement entre le deuxième parti de l’opposition et le principal parti au pouvoir. Cependant, au cas même où on considère que le MNSD-NASSARA peut, demain ou après-demain, claquer la porte de l’opposition et frapper celle du pouvoir qui lui sera facilement ouverte, on peut se poser la question de savoir de ce que Seïni Oumarou et ses partisans iront vraiment chercher dans le pouvoir du Président Issoufou Mahamadou. Aussi simple qu’elle paraît, cette question a tout son pesant d’or pour plusieurs raisons.

 La toute première est de savoir qu’est-ce que le MNSD-NASSARA, avec sa vingtaine de députés à l’Assemblée nationale, pourra apporter de plus à un pouvoir qui dispose d’une majorité plus que confortable de plus de cent (100) députés sur les cent soixante onze (171) que compte le Parlement ? Si en 2011 le PNDSTARAYYA avait courtisé le MNSD-NASSARA – sous prétexte que son allié le Mouvement Démocratique pour une Fédération Africaine (MODENFA/LUMANA-AFRICA) de Hama Amadou voulait mettre le Président Issoufou Mahamadou en cohabitation–, aujourd’hui quel est le parti de l’actuelle majorité au pouvoir qui peut inquiéter le Président Issoufou Mahamadou, au point de le mettre en cohabitation ?

La seconde raison qui pousse à se demander ce que le MNSD-NASSARA ira chercher dans le pouvoir de la Renaissance acte II est liée au fait que le parti de Seïni Oumarou, qui était la deuxième force politique au sortir des élections générales de 2011 s’est retrouvé à la troisième place après les présidentielles et les législatives de 2016, suite à son «concassage» par le PNDS-TARAYYA qui a provoqué le départ massif de ses cadres et militants dont certains ont rejoint ses rangs et d’autres ont créé le Mouvement patriotique et républicain (MPR-Jamahuriya), aujourd’hui deuxième force de la mouvance présidentielle, avec une quinzaine de députés. Le MNSD NASSARA pense-t-il sincèrement que le PNDSTARAYYA peut sacrifier ses anciens militants regroupés au sein du MPR-Jamahuriya – qu’il ne cesse de remercier pour avoir déjoué la manœuvre de la mise en cohabitation du Président Issoufou Mahamadou, à laquelle lui le MNSD NASSARA aurait activement participé – pour faire de lui le nouveau chouchou d’un pouvoir dont il avait contesté la légitimité ?

Seïni Oumarou pensent-ils qu’au cas même où le Président sortant Issoufou Mahamadou accepte de partir à la fin de son second et dernier mandat constitutionnel, le PNDS-TARAYYA va subitement renoncer à la conquête du pouvoir pour les aider à le remporter en 2021 ?

A propos, il y a d’ailleurs lieur de se demander pourquoi le parti au pouvoir tient-il coûte que coûte à avoir le MNSD sous sa botte ? Avec une cinquante de parti politique et une opposition dans un coma profond, l’Alliance qui soutient le président Issoufou est assuré de la stabilité de son régime jusqu’aux prochaines élections générales.

La Renaissance Acte II ne dira pas non plus qu’elle a besoin des cadres de ce parti pour prendre son envol. C’est lui qui a délibérément mis à la touche ces cadres qui ne demandent qu’à être nommés. La seule explication possible est que le président Issoufou balise le terrain de manière à pouvoir réussir un passage en force au-delà de ses deux mandats constitutionnels. Pour l’instant, on n’en est pas encore là mais nous avons encore en mémoire un Tandja Mamadou qui affirmait haut et fort que « la table est desservie, il faut partir ». La suite est connue de tous. Donc si malgré son imposante majorité, son pléthorique gouvernement et sa suprématie physique (la force publique) le PNDS tente d’engloutir le MNSD, c’est bien en perspective de 2021. Et si c’est pour passer le témoin à un autre militant, le parti ne se donnerait pas tout ce mal quelques mois seulement après le début du second mandat. Ce qui est sûr, il y a anguille sous roche.

La troisième raison qu’on peut évoquer, pour se demander ce que le MNSD-NASSARA ira chercher dans le pouvoir de la Renaissance acte II, est relative à la situation économique même du pays. En effet, il est presque su de tous les Nigériens qui savent analyser les choses avec objectivité que depuis quelques temps le Niger est en proie à une situation financière des plus difficiles, au point où l’Etat peine à faire face à ses dépenses de souveraineté. Au cas même où un éventuel ralliement du MNSD-NASSARA à la mouvance présidentielle n’aura pour seul motif que le désir de ce parti de trouver quelques strapontins à certains de ses cadres et militants qui ne sont pas prêts à passer les cinq prochaines  années à attendre dans l’opposition, on peut légitimement se demander ce qu’il y a de suffisamment à croquer dans la situation actuelle. Le MNSD-NASSARA ne risquerait-il pas de prendre des postes où il n’aura que des problèmes à gérer, engageant ainsi sa responsabilité dans le bilan du second mandat du Président Issoufou Mahamadou ?

Oumar A.M

Le Monde d’Aujourd’hui