Sénégal : l’ancien président Macky Sall visé par une proposition de mise en accusation pour haute trahison, Wallu Sénégal dénonce une "grave forfaiture"
Le député Guy Marius Sagna, membre du groupe parlementaire PASTEF - Les Patriotes, a officiellement saisi l’Assemblée nationale pour demander la mise en accusation de l’ancien président Macky Sall devant la Haute Cour de Justice. Il l’accuse de faits graves liés à une gestion opaque des finances publiques, qu’il estime relever de la haute trahison. Une initiative inédite qui a aussitôt suscité la colère du groupe parlementaire Wallu Sénégal, qui dénonce une "grave forfaiture" et une tentative de déstabilisation du modèle démocratique sénégalais.
Dans un courrier adressé au président de l’Assemblée nationale, Malick Ndiaye, en date du 11 avril, Guy Marius Sagna s’appuie sur l’article 101 de la Constitution sénégalaise pour justifier sa démarche. Le député dénonce une série de manquements graves dans la gestion des finances publiques sous le magistère de Macky Sall, pointant notamment des violations manifestes de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).
Selon l’exposé des motifs, plus de 2 517 milliards de francs CFA auraient été contractés sans autorisation parlementaire, ni intégration dans une loi de finances régulièrement adoptée. À cela s’ajoute l’usage qualifié d’« irrégulier » de comptes de dépôt au Trésor à hauteur de 2 562 milliards de francs CFA. Des opérations qui, selon Guy Marius Sagna, ont échappé à tout contrôle parlementaire, compromettant la transparence et la sincérité des finances publiques.
« La dette réelle du Sénégal pourrait approcher les 100 % du PIB, bien au-delà des chiffres officiels présentés sous Macky Sall », affirme le député, se fondant sur les redressements de la Cour des comptes. Il dénonce une « politique de dissimulation systématique » et une volonté de « contourner les institutions de la République », évoquant des conséquences graves sur la crédibilité et la souveraineté financière du pays.
Le parlementaire estime que de tels actes, par leur ampleur et leur impact sur les générations futures, s’apparentent à de la haute trahison. Il appelle l’Assemblée nationale à exercer pleinement sa compétence constitutionnelle et à se prononcer sur cette mise en accusation.
Le Groupe parlementaire Takku Wallu Sénégal est monté au créneau ce mardi 15 avril pour dénoncer ce qu’il qualifie de « grave forfaiture ». Dans un communiqué de presse publié, le groupe dirigé par la présidente du groupe Wallu Sénégal fustige une démarche politique jugée « destructrice » et « indigne d’une démocratie respectueuse des principes républicains ». Le groupe affirme avoir pris connaissance du projet via la presse, dénonçant une initiative unilatérale d’un député de la majorité, qu’il accuse de formuler des « affirmations gratuites » sans fondement juridique solide.« C’est bien la première fois dans l’histoire politique de notre pays, jalonnée d’alternances paisibles, qu’un nouveau pouvoir cherche à atteindre un ancien chef d’État par la violence institutionnelle et la manipulation des consciences », peut-on lire dans le communiqué.
Pour Takku Wallu Sénégal, les accusations portées contre Macky Sall ne sauraient être qualifiées de haute trahison, seule infraction susceptible de justifier une mise en accusation présidentielle selon l’article 101 de la Constitution. Le groupe parlementaire rappelle que les faits de gestion économique avancés par le député Guy Marius Sagna n’engagent pas directement la responsabilité pénale de l’ancien président, estimant que ce dernier n’est pas responsable des actes administratifs relevant de ses anciens collaborateurs. « Cette basse manœuvre, destinée à salir l’image et la réputation d’un grand Africain dont le leadership est reconnu à travers le monde, sera vouée à l’échec », poursuit le communiqué.
Face à ce qu’il qualifie de « justice de vainqueurs », Takku Wallu Sénégal annonce qu’il utilisera tous les moyens démocratiques pour faire échec à cette initiative, et appelle les citoyens sénégalais épris de paix et de justice à se mobiliser pour préserver l’unité nationale et l’intégrité des institutions.
Si cette résolution venait à être votée par une majorité des trois cinquièmes des députés, Macky Sall pourrait être traduit devant la Haute Cour de Justice, une première dans l’histoire politique du Sénégal. L’ancien président, qui a quitté le pouvoir en mars 2024 après douze ans à la tête du pays, n’a pas encore réagi publiquement à cette initiative parlementaire explosive. L’affaire promet d’agiter les travées de l’hémicycle et pourrait marquer un tournant majeur dans la reddition des comptes des plus hautes autorités de l’État au Sénégal.