Le statut du personnel de l’Administration Territoriale ou la fin de la dégénérescence de l’Etat au niveau déconcentré (Quatrième partie)
L’année 2000 fut sans conteste marquée par l’arrivée au pouvoir de Mamadou Tandja, élu Président de la République. Il inaugurait une nouvelle République, la cinquième de l’Histoire de notre pays, après une courte transition militaire dirigé par le commandant Wanké qui mit fin brutalement à la quatrième République dont le Général Baré Mainassara fut l’unique Président. Tanja fut également l’unique Président de cette 5ème République, durant les dix années de durée de vie de celle-ci.
A son tour, durant ces deux mandats constitutionnels, il signa plusieurs décrets de nomination du personnel du cadre de commandement. Ces personnes nommées ayant été les dépositaires de l’autorité de l’Etat au niveau déconcentré c’est-à-dire ayant représenté le Président de la République, le Premier Ministre et tous les membres du gouvernement dans les circonscriptions administratives de notre pays d’où l’intérêt de jeter un regard sur leurs profils.
De prime abord, il est utile de relever que le Président Tanja avait hérité de la transition militaire, de l’ordonnance n° 99-57 du 22 décembre 1999 déterminant la classification des emplois supérieurs de l’Etat et les conditions de nomination de leurs titulaires. Cette ordonnance classait en deux catégories les emplois supérieurs de l’Etat dont les emplois à caractère politique et les emplois techniques. Etaient déclarés techniques au niveau de l’administration territoriale à l’article 4 :
Les gouverneurs de régions, les préfets, les secrétaires généraux et secrétaires généraux adjoints des gouvernorats et des préfectures des régions, les sous-préfets et sous-préfets adjoints.
Cette ordonnance de 99, signée par le chef de la junte militaire Daouda Mallam Wanké avait suscité énormément d’espoir quant à une professionnalisation effective de la fonction de cadre de commandant à la fois banalisée et politisée depuis l’instauration de la démocratie au Niger.
Les premiers décrets de nominations au niveau de l’administration territoriale signés par le Président Tanja après son accession au pouvoir ne furent pas conformes à l’ordonnance pourtant en vigueur et qui encadrait en principe les nominations du représentant de l’Etat au niveau des régions, des départements ou des sous-préfectures. Cela suscita sans doute un sentiment de désapprobation chez les nigériens avisés du fait du non-respect du caractère technique de ces fonctions et la violation flagrante d’une ordonnance.
Ainsi, les décrets n° 2000-13 ; 2000-14 ; 2000-15/PRN du 11 février 2000, portant nominations des préfets consacraient les nominations de deux(2) directeurs administratifs, d’un (1) agronome, d’un (1) chargé d’enseignement et trois (3) personnes dont les profils n’y figuraient pas qui en réalité étaient respectivement instituteur, infirmier et agent d’assurance.
Ensuite, le décret n° 2000-94/PRN/MI/AT du 07 avril 2000 portant nomination de Secrétaires Généraux des préfectures, contrairement à gestion de l’alliance des forces du changement (AFC) permet néanmoins de noter le retour en force des spécialistes de la science administrative, bien outillés pour l’exercice d’une telle mission, tous ceux qui étaient promus sans exception étaient des directeurs administratifs produits de l’ENA.
De plus, le décret n° 2000-95/PRN/MI/AT du 07 avril 2000 portant nomination de Secrétaires Généraux adjoints consacrait la nomination d’un(1) inspecteur de la promotion humaine, deux(2) inspecteurs adjoints de la promotion humaine, un(1) chef de division d’administration générale et quatre(4) autres personnes dont ni les numéros matricules ni les profils ne figuraient dans le décret. Certainement, une promotion à ce poste très stratégique de militants sans emplois ou œuvrant dans le privé. Ces nominations confirment une fois de plus l’abandon définitif de la nomination des directeurs départementaux du plan, inspecteurs et/ou inspecteurs adjoints de promotion humaine, spécialistes de la planification et à charge de la coordination du développement au niveau du département , cumulativement Secrétaires généraux adjoints de préfecture.
Pour la nominations des sous-préfets, à travers le décret n° 2000-96/PRN/MI/AT du 07 avril 2000, l’on remarque un personnel au profil hétéroclite et souvent saugrenu n’ayant aucunement la capacité d’ assurer la gestion administrative de développement des territoires et promouvoir l’excellence, et cela pour répondre aux sollicitations d’ une clientèle politique à l’opposé des intérêts de notre pays qui devraient être privilégiés en toutes circonstances. En effet, il a été nommé seulement cinq(5) administrateurs, un(1) agent des collectivités, un(1) adjoint technique de la promotion humaine, cinq(5) contractuels, cinq (5) instituteurs, trois (3) professeurs de CEG, deux (2) inspecteurs de l’enseignement primaire, un (1) opérateur économique, un (1) ancien parlementaire, un (1) conseiller d’éducation physique et sportif (EPS), un (1) comptable, un (1) technicien électronicien à la retraite, un(1) cadre d’assurance, un (1) secrétaire de direction, un (1) adjoint technique d’élevage, un (1) ingénieur forestier, un (1) ingénieur de coopération et un (1) conseiller pédagogique.
Le décret n° 2000-97/PRN/MI/AT du 07 avril 2000 portant nomination d’adjoints aux sous-préfets consacrait également la priorisation d’un personnel au profil hétéroclite sans tenir compte du caractère technique de la fonction à travers la nomination de : dix (10) contractuels, huit (8) instituteurs, deux(2) professeurs de CEG, deux (2) agents d’élevage, un (1) conseiller agricole, un (1) assistant météo, un (1 ) militaire retraité et onze (11) personnes dont les profils ne figuraient pas sur le décret de nomination.
De même, le décret n°2000-98/PRN/MI/AT du 04 avril 2000 portant nomination de maires ne comportait que deux (2) administrateurs, la majorité étant des contractuels et des instituteurs. Pour la nomination des chefs de postes administratifs aucun administrateur n’avait été nommé à travers le décret n°2000-98/PRN/MI/AT du 04 avril 2000 où l’on pouvait constater la nomination de groupuscule de militaires à la tête des entités où il persistait le problème d’insécurité ainsi que la nomination d’un nombre important de contractuels et d’enseignants.
Lorsqu'un mouvement intervint au niveau des Secrétaires Généraux des Préfectures à travers le décret n° 2001-036/PRN/MI/AT du 6 février 2001, l’on notait la nomination de trois (3) directeurs administratifs et un (1) inspecteur de promotion humaine, les autres SG de préfectures, des directeurs administratifs n’ayant pas été affectés. Ce qui dénote une constante dans la priorisation des spécialistes de la science administrative à ce poste.
En dépit du non-respect des dispositions pertinentes de l’ordonnance n° 99-57 du 22 décembre 1999 déterminant la classification des emplois supérieurs de l’Etat et les conditions de nomination de leurs titulaires, l’on peut remarquer une volonté relative du régime de Tanja Mamadou à vouloir améliorer progressivement la qualité du personnel du cadre de commandement par la promotion des spécialistes de la science administrative. Ainsi, plusieurs cadres supérieurs expérimentés de l’Administration Publique avaient été nommés à ces fonctions déclarées désormais techniques depuis Wanké. La nomination de quatre(4) Gouverneurs à travers le décret n°2006-144/PRN/MI/D du 05 avril 2006 avait permis la promotion d’un(1) directeur administrative, d’un(1) ingénieur des travaux publics, d’un (1) ingénieur agronome et un (1) instituteur en plus des deux(2) infirmiers retraités, un (1) directeur administratif et un (1) gestionnaire qui étaient déjà gouverneurs des autres régions nommés de par le décret n° 2004-291/PRN/MI/D du 23 septembre 2004 portant nomination de gouverneurs.
De même, des cadres supérieurs de l’administration publique exclusivement composés de directeurs administratifs et quelques inspecteurs de promotion humaine avaient été promus comme Secrétaires Généraux et Secrétaires Généraux Adjoints au niveau des gouvernorats à travers les décrets n°2006-145/PRN/MI/D et n°2006-146/PRN/MI/D du 05 avril 2006.
Le décret n°2006-147 du 5 avril 2006 consacrait la nomination de vingt-deux(22) Préfets dont dix (10) directeurs administratifs, quatre(4) instituteurs, un(1)chargé d’enseignement, deux(2) conseillers pédagogiques, un(1) officier des FAN à la retraite, un(1) contrôleur adjoint de travail, un(1) cadre d’élevage et un(1) cadre d’assurance.
Enfin, l’année 2004 a vu les premières élections locales post-conférence Nationale se dérouler au Niger avec des maires désormais élu à la place des maires nommés en conseils de ministres selon la pratique étatique antérieure. Le processus de décentralisation amorcée à travers ces élections avait fait disparaitre la sous-préfecture du landerneau administratif du Niger, les anciennes sous-préfectures désormais érigés en préfectures.
Soumaila ABDOU SADOU
Administrateur Civil
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