La République quand on l’aime on l’enseigne : L’école publique nigérienne, le triangle des Bermudes et les rentiers…
« Quel dommage qu’un si grand homme soit si mal éduqué ». Ainsi parla Talleyrand à la sortie d’une audience où Napoléon, l’empereur des Français, l’avait copieusement invectivé parce que désemparé que son empire soit en lambeaux. On peut dire de la même chose des responsables des événements du 10 avril. Quel dommage que certains responsables descendent à ce niveau.
Nous vivons sous le règne de la fausse apparence et de la nulle appartenance, et chacun y va de sa bonne conscience mettant en avant les idéaux les plus « nobles ». Les « intellectuels de salon », les « ex enseignants donneurs de leçons » savent briller devant les flashs et les projecteurs pour déclamer leurs belles diatribes et montrer de beaux sentiments mais ferment les yeux face à des pratiques dont ils étaient les plus grands dénonciateurs durant le règne de la « refondation ».
Que comprendre de ce déclin programmé de l’école publique nigérienne, enclenché par les acteurs eux-mêmes ? Personne n’a encore réussi à détricoter l’écheveau. Nul expert n’a pu trouver une explication simple de cette crise sempiternelle qui sape chaque jour un peu plus l’enseignement. La seule vérité incontestable est que le système éducatif a entamé sa décadence et que nos autorités sont l’alpha et l’oméga de cette situation. Ils sont les principaux auteurs du travail d’érosion vers l’effondrement de tout l’édifice, ils semblent bien en être les complices ravis de l’échec de toute une génération qu’ils considèrent comme étant des dindons de farces. Les nigériens font partie de nos jours des peuples les plus dépressifs et les plus moroses du monde.
Matraques et grenades lacrymogènes à portée de main. Que comprendre de la furie dévastatrice des forces de l’ordre qui atteignent à bout portant un étudiant? La République ne connaît pas d’esclave, ni de maître, ni de castes, ni de nobles parce quela République est un système politique qui a aboli le hasard de la naissance pour le remplacer par l’égalité et le mérite. Les étudiants seraient-ils trop exigeants vis-à-vis d’un Etat dont les priorités en sont multiples ? Archifaux, lorsqu’on observe la vie luxueuse dans laquelle s’adonne les princes du régime en seulement quelques années de gestion.
Que ne se pose-t-il pas la question de savoir où ils puisent les millions qu’ils distribuent aussi allègrement à travers tout le pays ? Et si tel n’en est pas le cas qu’on nous dise d’une manière officielle combien touche par mois un ministre, un directeur, un gouverneur.Le danger, le péché originel, j’ai envie de dire congénital de cette imposture au sens gaullien du terme n’est rien d’autre qu’un mépris, un manque de considération vis-à-vis de l’école publique.
Les citoyens en quête de repères sont dans le flou et plus que jamais désireux de nouveaux espaces et instruments d’engagement. Inventer une nouvelle forme de citoyenneté, de « renaissance culturelle » préconise également une éthique renforcée. Un pays ne peut fonctionner sans des valeurs morales solides car son émergence en dépend. Plus précisément, un pays ne fonctionne plus lorsque les citoyens ne veulent plus ou ne savent plus à qui se fier. Quand les leaders n’agissent plus en références, il ne faut rien attendre du pays.Tout ce discours n'est que de la poudre aux yeux.
Malheureusement cette descente aux enfers du système éducatif de notre pays ne nous surprend gère, car cette renaissance culturelle que le gouvernement veut promouvoir aurait dû commencer dès la formation du gouvernement en mettant des technocrates compétents au niveau des différents ministériels clés. Comment voulez-vous que des aveugles conduisent ceux qui voient ?
Tant que l'accession à un poste de responsabilité se fera par d'autres considérations que la compétence, il n'y aura jamais de renaissance !!! Pour construire une maison solide il faut une bonne fondation, or à l'heure actuelle le régime n'a posé aucun acte allant dans la réalisation d'abord de cette fondation. Le régime continue à nommer les nigériens sur la base des considérations partisanes, familiales et autres et voilà déjà les conséquences.Quand dans une République tout se vaut, tout devient possible surtout le pire.
La philosophe Hannah Arendt s’inquiétait dans les années 50 déjà dans un récit que l’on peut qualifier de « prémonitoire » Qu’est-ce que la politique, des dérives de la politique : « Au lieu de procéder de l’une des nombreuses sources possibles du vivre ensemble humain et de se nourrir de ses profondeurs, l’action politique se tient de manière opportunistes à la surface des évènements quotidiens pour être emportée par eux dans les directions les plus différentes » Sacré constat ! Que Dieu sauve l’école publique !!!
SAMI Youssouf Master 1 en Administration Générale (ENAM Niamey) et Master 2 en Gestion de Projets (BEM Dakar).
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