Obsèques de Karidjo Mahamadou : la nation nigérienne rend hommage à un homme de conviction

Ancien ministre, syndicaliste et éducateur engagé, Karidjo Mahamadou, décédé à 72 ans à Paris, a été inhumé ce dimanche au cimetière musulman de Yantala, en présence d’anciens présidents de la République, de ministres, de camarades de lutte, de proches, d’anciens élèves et de simples citoyens venus lui rendre un dernier hommage. Karidjo Mahamadou aura marqué de son empreinte plusieurs décennies de vie politique et éducative nigérienne. Sobriété et dignité ont marqué cette cérémonie à l’image de l’homme qui a profondément marqué la vie politique et éducative du Niger.

Dans une atmosphère empreinte d’émotion et de solennité, l’un des hommages les plus marquants fut celui de l’ancien ministre Foumakoye Gado, compagnon de route et ami de longue date. Dans une oraison funèbre vibrante, parfois interrompue par l’émotion, il a retracé le parcours exceptionnel de Karidjo Mahamadou, intellectuel engagé né le 11 septembre 1953 à Gouré, dans la région de Zinder, dont la vie fut consacrée à l’éducation, au militantisme syndical et à la politique.

Le défunt fut d’abord un passionné d’éducation. Après des études primaires à Tillabéri et secondaires à Niamey où il obtient son BEPC en 1971, il intègre l’École normale de Zinder. Il en sort diplômé (DRN) en 1975 avant de poursuivre sa quête du savoir : stage au Ghana à l’université de Legon en 1976, CAP/CEG option français à l’École de pédagogie de l’université de Niamey, puis maîtrise d’anglais en 1986.

« Chargé d’enseignement en anglais dans plusieurs établissements scolaires du Niger, tu fus un modèle pour tes élèves qui reconnaissent en toi un professeur qui a donné le meilleur de lui-même », a souligné M. Gado, devant une assistance visiblement émue.

Sa passion pour l’éducation le conduira à fonder le lycée privé Alhéri en octobre 1987, contribuant ainsi à promouvoir le système éducatif nigérien. Mais parallèlement à sa carrière d’enseignant, Karidjo Mahamadou s’engage très tôt dans le syndicalisme et la politique.

Dès 1973, à l’École normale de Zinder, il préside la sous-section de l’Union des scolaires nigériens. « Ton activisme dans ce domaine t’a valu des arrestations et des emprisonnements », a rappelé M. Gado. « Tu fus par ailleurs à Zinder enrôlé d’autorité dans l’armée durant deux ans, ce qui t’avait valu la double casquette d’élève soldat et d’élève normalien ».

De 1979 à 1980, il devient secrétaire à l’organisation du bureau exécutif national du Syndicat national des enseignants du Niger (SNEN).

L’engagement politique de Karidjo Mahamadou culminera avec sa participation à la fondation du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS-Tarayya). Il en sera élu secrétaire adjoint à l’organisation du comité exécutif national provisoire.

Sa carrière politique fut riche et variée : maire de Tillabéri en 1992, député de Tillabéri et membre du groupe parlementaire en 1993, Premier questeur de l’Assemblée nationale, président de la commission des Affaires étrangères en 1994.

De mai 1995 à février 1996, il occupe le poste de préfet (actuellement gouverneur) du département de Maradi. En septembre 2004, il est élu quatrième vice-secrétaire général du parti lors du quatrième congrès ordinaire.

En avril 2011, Karidjo Mahamadou accède au portefeuille stratégique de ministre de la Défense nationale, qu’il conservera pendant près de cinq ans. Suite aux élections législatives de 2016, il est à nouveau élu député et investi par ses pairs président de la Haute Cour de justice.

Sa dernière fonction gouvernementale sera celle de ministre des Transports, du 30 octobre 2017 au 8 décembre 2020.

Foulakoye Gado a salué en Karidjo Mahamadou « un homme de combat, un éducateur chevronné et un homme de culture ». « Tu resteras à nos yeux un homme courtois, loyal, généreux, intellectuel, rigoureux et responsable politique qui a contribué au développement de notre pays », a-t-il affirmé.

Après l'oraison funèbre, les personnalités présentes se sont inclinées devant la dépouille mortelle et ont prononcé une Fatiha pour le repos de l'âme du disparu. La prière mortuaire a ensuite été dite à la morgue avant que le corps ne soit inhumé dans le carré musulman du cimetière de Yantala.