Droits de l’Homme: à l'initiative du RJDH, les journalistes échangent sur la loi sur la cybercriminalité et la liberté d'expression au Niger
Dans le cadre de ses activités, le Réseau des Journalistes pour les Droits de l’Homme (RJDH) a organisé, vendredi 26 mai 2023 à Niamey, un déjeuner de presse autour du thème : « Loi sur la cybercriminalité et la liberté d’expression ». Organisée avec la collaboration du Projet "ADALCI", financé par l'USAID, la rencontre avait pour objectif de faciliter les échanges entre les journalistes des médias publics et privés et des experts en matière de droits de l'homme sur les questions de répression de cybercriminalité et liberté d’expression au Niger. Elle a été l'occasion pour les participants de mieux comprendre la portée de ces législations ainsi que les perspectives pour une meilleure compréhension et prise en compte des enjeux relatifs à la liberté d'expression dans un contexte porté par l'évolution de la technologie numérique et qui s'accompagne aussi par une amplification de la cybercriminalité, poussant les gouvernements à faire adopter des lois parfois contraignantes pour encadrer ce domaine. Ce qui n'est pas sans impacter la liberté d'expression notamment, comme c'est le cas au Niger, les acquis en matière de dépénalisation des délits commis par voie de presse surtout dans un contexte d'insécurité.
C’est le Secrétaire général du Ministère de la Communication, M. Moustapha Tinao, qui a présidé l’ouverture de cette journée d'échanges qui s'est déroulée au restaurant Tabakady de Niamey, en présence du Président du RJDH, M. Ibrahim Abdou Tikiré, du Directeur adjoint du Projet ADALCI, M. Ouattara About Karno, ainsi que des responsables et journalistes d'une vingtaine de médias publics et privés.
Liberté d'expression et loi sur la Cybercriminalité au Niger
Dans son mot introductif, le Président du RJDH a tout d'abord souhaité la bienvenue à tous les participants à qui il a adressé les remerciements du Réseau pour leur présence massive à cet évènement, ce qui selon M. Ibrahim Abdou Tikiré, témoigne de l'importance qu'ils accordent à la question des droits de l'Homme en général et à la liberté de la presse en particulier. Il a ensuite rappelé que depuis la relance des activités du RJDH en 2021 avec l’élection d’une nouvelle équipe dirigeante, le Réseau a réalisé une série d’activités de renforcement des capacités des journalistes de la presse publique et privée de toutes les 8 régions du pays. Il a saisi l'occasion pour remercier tous les partenaires techniques et financiers ont accompagné le RJDH dans le cadre de la mise en œuvre de certains de leurs projets, axés sur la promotion et la protection des Droits Humains au Niger, comme cette rencontre de presse qui a été soutenue par le projet ADALCI, financé par l’USAID, à travers le volet "Droits de l’homme et accès à la justice au Niger". Pour M. Tikiré, cette activité donne l’occasion aussi au RJDH de marquer son empreinte dans le cadre de la célébration cette année du 75eme anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH). Il a annoncé que dans ce cadre, l’édition 2023 du concours des meilleures œuvres journalistiques sur les droits humains qu’organise le RJDH depuis deux ans avec l'appui de ses partenaires se déroulera avec des innovations. "Il incombe donc aux journalistes de multiplier les productions et écrits de qualité sur les droits humains pour être parmi les lauréats des 75ans de la DUDH", a ajouté le Président du RJDH avant d'indiquer que pour la présente activité, le Réseau et son partenaire ont retenu une question d’actualité à savoir la loi sur la cybercriminalité au Niger et liberté d’expression.
"Depuis l’adoption du texte sur la cybercriminalité au Niger, des journalistes ont été poursuivis et condamnés pour soit des articles publiés en ligne où pour avoir tout simplement relayé des articles d’autres médias en ligne", a mis en exergue M. Ibrahim Abdou Tikiré pour qui, "une telle situation vide la dépénalisation des délits commis par voie de presse au Niger de son sens, qui veut qu’aucun journaliste ne parte en prison pour ses opinions". C'est pourquoi, il a invité les confrères et consœurs présents à suivre avec la plus grande attention les exposés au cours des différents et de participer activement aux échanges "afin de mieux comprendre la ligne de démarcation entre liberté d’expression et cybercriminalité, et travailler librement sans être inquiété". Le Président du RJDH a fondé l’espoir qu’au terme de ce déjeuner-débat, des recommandations seront faites dans le cadre d’un plaidoyer pour doter notre pays d’un texte consensuel et inclusif plus protecteur des acteurs des médias, mais aussi des blogueurs et influencer au Niger. M. Ibrahim Abdou Tikiré a, enfin, annoncé qu'après les journalistes de la capitale, ceux de l’intérieur du pays bénéficieront également de ce genre d’activités sur diverses thématiques en lien avec les Droits humains.
La liberté d'expression, un droit fondamental à protéger et à promouvoir
En prenant la parole, le Directeur adjoint du Projet "ADALCI" a souligné que la liberté d’expression fait partie des droits fondamentaux accordés à chaque individu et assurés dans un état de droit en s'appuyant sur les principales dispositions des instruments internationaux, régionaux et internationaux qui la consacre notamment la Déclaration universelle des droits de l'homme (DUDH), la Charte de l'Onu ainsi que la Constitution et plusieurs lois au Niger. "La liberté d’expression va de pair avec la liberté de la presse, car si « la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme », tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans certains cas précis. Dès lors que chacun a le droit d’exprimer sa pensée, ses idées, ses croyances, il doit aussi avoir le droit d’être informé et de pouvoir diffuser des informations", a souligné M. Ouattara Karno qui a, sur la même lancée, indiqué que "la législation sur la cybercriminalité vise généralement à traiter un large éventail de contenus illégaux ou préjudiciables publiés en ligne notamment la propagande terroriste, des contenus racistes, de discours de haine, de contenu sexuellement explicite comme la pornographie enfantine, de contenu blasphématoire, de contenu critique envers les États et leurs institutions et de contenu non autorisé par les détenteurs de droits de propriété intellectuelle".
Selon le Représentant du Projet "ADALCI", c’est souvent le domaine dans lequel ces législations sont le plus en conflit avec le droit à la liberté d’expression et le droit à l’information. En 2011, a-t-il rappelé, le Rapporteur spécial des Nations unies sur la liberté d’expression a déclaré que les seuls types d’expression que les États peuvent interdire en vertu du droit international sont la pornographie enfantine ; l’incitation directe et publique à commettre un génocide ; le discours de haine ; la diffamation ; et l’incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence. "Même la législation qui criminalise ces formes d’expression doit être précise, comporter des garanties adéquates et efficaces contre les abus ou les détournements, et prévoir un contrôle et une révision par un tribunal ou un organisme de réglementation indépendant et impartial", a mis en exergue M. Ouattara Karno pour qui, c’est cette raison qui justifie la pertinence de l’organisation de ce petit déjeuner débat sur le thème de la liberté d’expression et la Cybercriminalité surtout dans un contexte sécuritaire comme celui du Niger. "Le projet Adalci encourage ce genre de rencontre entre producteurs de contenus médias et décideurs afin de, non seulement, échanger sur le contenu des textes en vigueurs, mais aussi et surtout, parler de ses limites et conditions d’application", a-t-il souligné. "C’est seulement à ce prix que nous pouvons garantir un meilleur respect des libertés fondamentales, notamment la liberté d’expression dont fait partie la liberté de la presse. Notre engagement à la protection et la promotion des Droits humains au Niger se traduit, entre autres, par l'appui de ce genre d'initiatives qui cadre parfaitement avec nos objectifs", a-t-il ajouté avant de présenter le Projet Adalci. Il s'agit d' un projet de 4 ans commencé en 2020, dont l’objectif général est de réduire la vulnérabilité à l’extrémisme violent en mettant l’accent sur la défense des Droits humains et l’accès à la Justice, dans toutes ses composantes dont la promotion et le renforcement de la justice traditionnelle et formelle ainsi que la promotion et la protection des Droits humains qui se traduit par un appui à la Commission Nationale des Droits humains (CNDH) et aux organisations de la société civile afin de renforcer leurs moyens d’intervention, d’enquête et de protection. C'est du reste dans ce cadre que s'inscrit l'appui du projet "ADALCI" aux activités du RJDH comme la présente rencontre.
Le gouvernement engagé à promouvoir la liberté de presse au Niger
En procédant à l'ouverture officielle du déjeuner-débat, le Secrétaire général du Ministre de la Communication a tenu, au nom du ministre Laoualy Dan Danno, à présenter ses sincères félicitations aux membres du RJDH pour cette noble initiative visant le renforcement des capacités des professionnels des médias nigériens, initiative qui cadre parfaitement avec les missions assignées à son département ministériel. Ainsi, a déclaré M. Moustapha Tinao, en acceptant de parrainer la présente cérémonie, le Ministère de la Communication réaffirme son ferme soutien à toute action visant à outiller les journalistes sur diverses thématiques, notamment celles relatives à la promotion et à la protection des droits Humains au Niger. Selon le SG du ministère de la Communication, ce déjeuner de presse par-delà son objectif principal qui est d’édifier les hommes et les femmes des médias sur la loi sur la cybercriminalité, contribuera à n’en point douter au renforcement de l’Etat de droit et de la démocratie si cher aux autorités de la 7èmeRépublique. Au Niger, a poursuivi M. Tinao, "les médias traditionnels, notamment l’audiovisuel et la presse écrite, constituent les canaux principaux de diffusion de l’information. Toutefois avec le développement des nouvelles technologies de l’information qui a entrainé l’avènement des réseaux sociaux, des médias en ligne ont fait leur apparition. Ces médias ne sont pas aujourd’hui négligeables du fait de leur efficacité et de leur promptitude dans la collecte, le traitement et la diffusion de l’information". Aussi, a-t-il poursuivi, "conscient du rôle majeur que joue l’information véhiculée par les réseaux sociaux, l’Etat du Niger a élaboré une loi sur la cybercriminalité, pour l’encadrer".
Poursuivant son allocution, le SG du ministère de la Communication a indiqué que le présent déjeuner de presse vise à familiariser les représentants des médias avec le contenu de la loi réprimant la cybercriminalité. C’est pourquoi, il a invité les journalistes et les responsables des médias à suivre attentivement les différentes communications qui leurs seront présentées par les panélistes afin de tirer largement profit de leurs expériences avant de les inviter aussi à des échanges fructueux afin que la loi sur la cybercriminalité soit internalisée par les journalistes que vous êtes. "Le Gouvernement nigérien a toujours œuvré dans le cadre de la promotion et de la protection des droits humains. C’est pourquoi, dans son programme de Renaissance Acte III, le Président de la République, Chef de l’Etat, Son Excellence MOHAMED BAZOUM disait et je le cite « Je veillerai tout au long de mon mandat à promouvoir et à protéger le droit inaliénable de chaque citoyenne et de chaque citoyen » fin de citation. Aussi, pour lui emboiter le pas, le Premier Ministre, Chef du Gouvernement, M. OUHOUMOUDOU MAHAMADOU, a dans sa Déclaration de Politique Générale, réaffirmé que « des actions seront mises en œuvre par le gouvernement pour améliorer et renforcer le cadre règlementaire et juridique en matière de promotion et de protection des droits de l’Homme », a rappelé M. Moustapha Tinao qui, au nom des plus hautes autorités du pays, a tenu à adresser ses remerciements à l'USAID et aux responsables du projet "ADLACI" pour cet important appui au renforcement des capacités des médias et journalistes nigériens.
Des exposés instructifs et des échanges fructueux sur la liberté d'expression dans un contexte d'insécurité
Peu après l'ouverture officielle, les participants ont suivi deux panels dont le premier sur "la Loi sur la cybercriminalité : Infractions, responsabilité pénale des personnes morales, poursuite et techniques d'investigation", par le magistrat M. Nani Soli, et la seconde sur "les avantages et limites de la loi sur la cybercriminalité en matière de liberté d'expression", qui a été présenté par M. Ismaël Laoual Salaou, Journaliste et ancien conseiller du Président du Conseil supérieur de la Communication (CSC) avec comme modérateur, M. Boubacar Diallo, journaliste, ancien Président de la maison de la Presse.
La rencontre s'est par la suite poursuivie avec des questions et réponses ainsi que des échanges et contributions entre les panélistes et les participants, des débats qui ont notamment porté sur les contours de cette loi surtout dans ce contexte d’insécurité.
M. Abdoul Karim (actuniger.com)
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