Justice: lancement officiel du Programme d'innovation de la justice au Niger (PIJN), pour une justice accessible, efficace et équitable à tous les citoyens
L'hôtel Radisson Blu de Niamey a servi de cadre, ce mercredi 25 mai 2022, à l'atelier de restitution de l'enquête sur les besoins et la satisfaction des citoyens en matière de justice, couplé au lancement officiel du Programme d'Innovation de la Justice au Niger (PIJN). Il s'agit d’un programme étalé sur cinq (05) ans pour une enveloppe de près de 6,5 milliards de francs CFA, financé par le Royaume des Pays-Bas et mis en œuvre par Hague Institute for Innovation of Law (HiiL), avec comme principal objectif, rendre la justice accessible à tous, en ligne avec les Objectifs de Développement Durable des Nations unies (ODD16.3).
C'est le ministre de la Justice, Garde des Sceaux, M. Ikta Abdoulaye Mohamed qui a présidé la cérémonie d'ouverture de l'atelier de restitution des données de l'enquête sur les besoins et la satisfaction en matière de justice (JNS) couplé au lancement officiel du Programme d'innovation de la justice au Niger (PIJN). La cérémonie s'est déroulée en présence de l'Ambassadeur des Pays-Bas au Niger, SE. Paul Tholen, la directrice du programme Sahel de HiiL, Mme Britt Van Der Donk, des représentants du corps diplomatiques et des organisations internationales accrédités au Niger, des responsables de la société civile et des institutions nationales engagés dans le renforcement de la justice et la promotion des droits humains ainsi que de plusieurs invités.
Des reformes pour une justice accessible, équitable et efficace
Dans le discours de lancement qu'il a prononcé à cette occasion, le ministre de la Justice s'est félicité de cette initiative qui est l'aboutissement d'un processus qui a commencé depuis 2019 avec la première visite effectuée au Niger par le Directeur général de l'Institut de la Haye pour l'Innovation du droit (HiiL), M. Sam Muller. "Le 19 décembre, soit moins de deux mois après cette visite, nos deux institutions ont signé un accord de partenariat qui prévoyait, entre autres, la réalisation d'études sur la satisfaction des attentes et des besoins des usagers du service public de la justice", a rappelé le ministre Ikta Mohamed qui a, par la même occasion souligné que grâce à l'engagement de HiiL et au soutien de l'Ambassade des Pays-Bas au Niger, "nous venons de réaliser l'une des plus grandes enquêtes nationales exclusivement consacrée à la justice, au regard non seulement des zones touchées, mais aussi de l'importance de son échantillon".
Abordant les résultats de l'enquête, qui a été réalisée en collaboration avec le LASDEL, le ministre a estimé que les résultats donnent un large aperçu du niveau de satisfaction des citoyens nigériens et surtout leurs besoins en matière de justice. C'est ainsi, et comme l'a rapporté le Garde des Sceaux, il ressort des résultats de l'enquête, qu'environ 51% seulement des problèmes de justice sont réglés et environ 68% sont considérés comme réglés de manière juste et très juste. "Si dans les deux cas, nous sommes au-dessus de la moyenne, il n'en demeure pas moins que nous pouvons mieux faire en créant les conditions pour que la quasi-totalité des problèmes de justice dont nous sommes saisis puissent être réglés à la satisfaction de toutes les parties", a déclaré le ministre de la Justice qui a d'ailleurs, tenu à préciser que la résolution de ces litiges ne concerne pas que le système de justice formel, mais elle concerne aussi nos mécanismes traditionnels de résolution des litiges entre personnes.
Dans la même lancée, le ministre Mohamed Ikta Abdoulaye a aussi évoqué d'autres indicateurs ressortis des résultats de l'enquête et qui sont illustratifs à plus d'un titre. En effet, a-t-il souligné sur la base des données, seulement 10% des litiges sont portés devant les tribunaux tandis qu'environ 30% sont portés devant les autorités coutumières et religieuses."C'est pour tenir compte de cette donnée que le Programme de la Renaissance Acte III prévoit de mieux valoriser les mécanismes de résolution des différends dans la perspective de rendre notre justice accessible, équitable et efficace", a indiqué le Garde des Sceaux qui a, par la même occasion, souligné qu'à cet effet, et conformément à la Déclaration de politique générale du gouvernement (DPG), "nous nous sommes engagés à poursuivre les reformes juridiques et institutionnelles pour mieux prendre en compte les mécanismes traditionnels auxquels une grande majorité de nos concitoyens font recours pour le règlement de leurs différends".
Dans son allocution, le ministre a tenu à saluer la démarche Hill à laquelle les autorités adhèrent pleinement et a assuré les partenaires que son département ministériel est résolument engagé à tout mettre en œuvre pour la réussite de ce programme en vue de l'amélioration de l'accès et de l'utilisation des données et des connaissances sur les besoins de justice, du renforcement des capacités des professionnels de la justice et des prestataires de service de justice. Le ministre Ikta Abdoulaye a saisi l'occasion pour transmettre la gratitude des autorités et des populations bénéficiaires au Royaume des Pays-Bas qui finance le programment ainsi qu'à Hill en charge de la mise en œuvre du Programme d'Innovation de la Justice au Niger (PIJN).
L'Etat de droit et l'accès à justice, gage d'un développement durable
Auparavant, l'Ambassadeur des Pays-Bas au Niger a pris la parole pour saluer la coopération entre les deux pays et rappelé le contexte dans lequel s'inscrit l'étude ainsi que le PIJN. "Les résultats de l'étude constituent une base solide de départ pour la mise en œuvre du Programme d'innovation de la justice au Niger, qui vise à promouvoir une justice axée sur les personnes", a indiqué SE. Paul Tholen pour qui, l'étude a fait ressortir les principaux problèmes de justice auxquels les citoyens sont confrontés au cours des quatre (04) dernières années. De plus, a ajouté le diplomate, les résultats montrent les différents parcours des justiciables pour résoudre leurs problèmes, les mécanismes et les sources d'informations auxquelles ils ont recours pour atteindre leurs objectifs. "La disponibilité de cette information devra aider le gouvernement de changer de comportement et de prendre en compte la perception de la population dans ses politiques et stratégies", a mis en avant l'Ambassadeur des Pays-Bas au Niger.
Dans son allocution, l'Ambassadeur Paul Tholen s'est aussi félicité de la politique actuelle du gouvernement en matière de justice notamment les objectifs visant à une amélioration de la justice par le renforcement des capacités opérationnelles, la promotion de l'accès à la justice par la réduction, voire l'élimination des obstacles auxquels les usagers sont confrontés ainsi que le renforcement de la protection des droits et libertés des populations.
"L'Etat de droit et l'accès à la justice sont des conditions préalables à une paix et un développement durable, pas seulement au Niger mais partout au monde. Un système judiciaire qui fonctionne bien est essentiel pour maintenir et renforcer le contrat social entre l'Etat et ses citoyens. S'il est vrai qu'il reste encore du chemin à parcourir, il est tout aussi vrai que le Niger a fait un grand pas en la matière, et qu'il y a une volonté politique". SE. Paul Tholen, Ambassadeur du Royaume des Pays-Bas au Niger.
Un Programme pour une justice axée sur les personnes
Peu après la cérémonie officielle d'ouverture, les travaux se sont poursuivis avec la présentation du Programme de Justice axée sur les personnes par Mme Britt Van Der Donk, Directrice du Programme Sahel de Hill puis la restitution des données de l'enquête sur les besoins et la satisfaction des citoyens en matière de Justice. Après la séance des questions réponses pour mieux édifier les participants sur les résultats de l'enquête qui a été menée en collaboration avec le LASDEL, des travaux de groupe ont été organisés ainsi que des discussions de réseautage avant la séance plénière de restitution des travaux de groupe.
Il convient de noter que le Programme d'Innovation de la Justice au Niger (PIJN) qui couvre les huit (08) régions du Niger va s'étaler sur cinq ans (2022-2027). Il est financé par le Royaume des Pays-Bas pour une enveloppe de 9.900.000 euros soit 6 milliards 485 millions de francs CFA. Il est mis en œuvre par HiiL en collaboration avec l'Ambassade des Pays-Bas au Niger et le Ministère de la Justice et va bénéficier aux personnes confrontées à des problèmes de justice au Niger ainsi qu'aux acteurs intermédiaires que sont les institutions et le personnel fournissant des services de justice au Niger. L'impact global attendu est d'autonomiser les personnes et les institutions afin de les aider à prévenir ou résoudre les problèmes de justice les plus urgents, comme le montrent les données recueillies en 2021 dans le cadre de l'enquête JNS effectuée dans les différentes régions du pays.
Notons enfin que Hill (The Hague Institute for Innonvation of Law) est une entreprise sociale basée à La Haye et qui se consacre à une justice conviviale, c'est à dire une justice facile d'accès, facile à comprendre, abordable et efficace. Son objectif est de faire que d'ici 2030, 150 millions de personnes soient en mesure de prévenir ou de résoudre leurs problèmes de justice les plus urgents en stimulant l'innovation et en mettant à l'échelle ce qui fonctionne le mieux.
Ikali Dan Hadiza (actuniger.com)
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