Gestion des fonds de la Défense : après sa vaine indignation, le ministre Katambé s’en remet désormais à Dieu !
Le jeudi 30 juillet dernier, le ministre de la Défense nationale était au camp Garba Hassane de Niamey pour une cérémonie de remise d’un don par la haute Autorité du Waqf aux familles des agents des forces de défense et de sécurité tombés sur le champ d’honneur. A cette occasion, le Pr Issoufou Katambé a mis en garde ceux qui sont chargés de la gestion du don sur la nécessité de veiller à une bonne répartition, leur rappelant qu’ils auront à rendre compte à Dieu. Après son indignation qui a fait beaucoup de bruit suite à la découverte des détournements des fonds alloués à la Défense, le ministre Katambé semble désormais s’en remettre à Dieu d’autant que malgré son indignation et ses engagements à faire payer les indélicats, l’affaire est en train de pschitt...
« Ce don qui vient d’être fait est destiné aux veuves et aux orphelins. Quiconque aura à le gérer et qui aurait pris un grain, il aura à rendre compte dans l’au-delà !». Ainsi a parlé le ministre de la Défense nationale, Pr Issoufou Katambé, la veille de la fête de Tabaski, au camp Garba Hassane (camp 6e), à l’occasion de la remise d’un don de la Haute Autorité du Waqf aux familles des agents des forces de défense de sécurité tombés sur le champ d’honneur. « N’oubliez jamais que vous allez tôt ou tard rendre compte auprès de Dieu ! », a encore insisté le ministre Katambé à l’endroit de ceux qui sont chargés de la gestion et de la distribution du don.
En bon musulman et dans une société majoritairement musulmane, les propos du ministre Katambé n’ont rien d’anormal même si en République du Niger, l’Etat est laïc. Sauf que la nature de ces propos tenus par le ministre de la Défense s’interprète comme un aveu d’impuissance au regard du contexte de ces derniers temps qui a été marqué par l’affaire dite de l’audit du « Ministère de la défense nationale ». Une affaire de malversations dans la gestion des fonds alloués à l’armée dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et que le ministre de la Défense a lui-même malencontreusement ébruité dans un audit qui a fait couler beaucoup d’encre. Dans cet audio, qui a poussé le gouvernement à reconnaitre publiquement les faits, le ministre Katambé a fait part de sa profonde indignation sur la destination prise par ses fonds qui ont été détournés de leurs objectifs. «Le gouvernement a mobilisé les fonds nécessaire pour mettre nos forces de défense et de sécurité dans les moyens de combattre le terrorisme mais ils ne sont jamais arrivés à destination! On a acheté des fusils et des munitions mais, sur le champ de bataille, certaines cartouches de mauvaise qualité ne détonnaient même pas. Ce sont les soldats eux-mêmes qui me l’ont dit. Cela a été même dit à l’Assemblée nationale et l’ancien chef d’État-major l’a dit aux députés », rapportait le ministre qui avait annoncé également que « les enquêtes sont en cours et, par la grâce de Dieu, si on suit bien ce que je recommande, tout ce celui qui a détourné l’argent des pauvres, il va le vomir». Mieux encore, le Pr Katambé avait promis que « si des militaires sont impliqués dans des malversations, il faut qu’ils sortent l’argent et qu’ils payent. Je n’ai peur de personne ! ». Emporté par son indignation devant l’ampleur des malversations contenues dans le rapport d’audit de l’Inspection générale de l’armée et de la Gendarmerie nationale (IGA/GN), le ministre s’est d’ailleurs laissé dire dans le fameux audio, que s’il ne tenait qu’à lui, il ferait bien passer les mis en cause par les armes. « Mais maintenant qu’on parle des droits de l’Homme, ça n’ira pas jusque là», a-t-il regretté, avant d’annoncer que de toute façon, « tous les renseignements ont été obtenus. On sait ce que chacun a fait et n va amener le rapport au Président qui va décider ce qu’il va en faire».
Aveu d’impuissance
Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous le pont. Le gouvernement a certes sorti reconnaitre les faits et a promis une suite à l’affaire. Après un second voir d’autres rapports, les montants ont été revus nettement à la baisse. Le parquet a été saisi et le procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Niamey a fait savoir qu’une instruction judiciaire sera ouverte mais l’opinion s’est déjà faite son idée ! Au regard de l’évolution du dossier, tout laisse à croire que dans cette sulfureuse affaire et malgré la gravité des faits, la montagne est en train d’accoucher d’une souris ! Aucun des fournisseurs du ministère de la Défense nationale et encore moins les agents du ministère impliqués dans la chaine de passation des marchés incriminés n’a encore été inquiété. Après la sortie des avocats des principaux bénéficiaires des marchés ainsi que celle du procureur de la République, le sentiment que l’impunité sera encore de mise dans cette affaire comme tant d’autres sous ce régime s’est davantage renforcé au sein de l’opinion. Malgré le bruit qui a été fait, il ne subsiste que de nouveaux détails que rapportent les médias internationaux sur cette affaire qui va désormais au delà des frontières du pays. Avec les récentes apparitions publiques de certains des mis en cause dans l’audit avec le candidat du parti au pouvoir dans des meetings politiques, beaucoup de nigériens qui se sont aussi indignés, même dans les rangs de la majorité, ont fini par conforter leur opinion sur le fait que le ministère Katambé s’est trop indigné pour rien !
On comprend donc le ministre de la Défense nationale qui, par aveu d’impuissance à peine voilée, s’en remet désormais à Dieu ! Inutile de compter sur les lois de la République pour s’assurer du respect des procédures et mettre en garde ceux qui seront tentés de tirer profit ou faire du business avec les fonds destinés à l’armée. En dépit de cause, le ministre Katambé compte sur la bonne foi des uns et des autres car il a bien compris qu’il ne servait à rien de s’indigner et de promettre des sanctions…chacun rendra compte le jour du jugement dernier comme a insisté le ministre de la Défense nationale dont l’indignation et les engagements à faire payer les coupables lui ont valu une bonne image dans le cœur des nigériens. A sa décharge, il ne peut justement que s’indigner…
A.Y.B (actuniger.com)
Commentaires
C'est qui "nous" et ''vous''? On parle de d