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Bazoum reunion haut niveau crise 

Discours de SEM. Mohamed Bazoum, Président de la République, chef de l’état à la réunion de haut niveau sur :« Crises alimentaires et nutritionnelles dans les régions du Sahel et du Lac Tchad : Agir maintenant et mieux se mobiliser à l’avenir au Sahel et en Afrique de l’Ouest » (Paris, 6 Avril 2022).

  

Zeyna commission0

 

Mesdames et Messieurs les Ministres,

Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,

Messieurs les Présidents des Commissions de la CEDEAO et de l’UEMOA,

Messieurs les Secrétaires Exécutifs du CILSS et du G5 Sahel,

Monsieur le Secrétaire Général de l’OCDE,

Monsieur le Président honoraire du Club du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest,

Mesdames et Messieurs les Commissaires et hauts représentants de l’Union Européenne et des Agences du Système des Nations Unies,

Mesdames et Messieurs les Hauts Représentants des Partenaires Techniques et Financiers,

Honorables invités,

Je voudrais de prime abord, remercier le Club du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest, l’Union Européenne et le réseau mondial contre les crises alimentaires pour m’avoir invité à participer à cette réunion de haut niveau. C’est pour moi un grand plaisir de prendre la parole à l’occasion de cette rencontre pour évoquer avec vous l’importante question des crises alimentaires et nutritionnelles dans les régions du Sahel et du Lac Tchad mais surtout, pour envisager avec vous les actions idoines à mettre en œuvre pour y faire face de façon immédiate et y remédier sur le long terme.

Mesdames et Messieurs ;

Au Sahel et en Afrique de l’Ouest, la saison pluvieuse 2021 a été marquée par des poches de sécheresse de 10 à 15 jours en juin et juillet qui ont eu un impact négatif sur le développement des cultures dans de nombreuses parties de la région (Nigeria, Niger, Burkina Faso, Cameroun, et Mali) et un arrêt brusque des précipitations en fin août-début septembre, ce qui avec les infestations parasitaires a compromis les récoltes. En outre, les inondations observées au cours du mois d’août ont également compromis les semis tardifs dans plusieurs zones du Sahel notamment dans le nord-est du Nigeria. Enfin, dans les zones en proie à l’insécurité, l’inaccessibilité aux champs et les destructions des récoltes ont aggravé la situation. C’est ainsi que selon les résultats du Cadre Harmonisé, les baisses de production par rapport à l’an dernier seraient de l’ordre de 36 pour cent pour le Niger, 18 pour cent pour la Mauritanie, 6 pour cent pour le Mali, et 6 pour cent pour le Tchad.

Sur le plan pastoral, l’hivernage 2021 a été bien moins productif que celui de l’année 2020 qui avait été marquée par des productions exceptionnelles en biomasse dans la plupart des pays de la bande sahélienne. Les déficits fourragers importants au Niger, en Mauritanie et au Nord-Ouest du Mali annoncent une soudure pastorale précoce et plus longue que durant l’année écoulée. Il faut noter aussi que les ménages pastoraux en plus de l’inaccessibilité aux  pâturages dans certaines zones du fait de l’insécurité, font face au  pillage du bétail, à la hausse des prix des céréales avec des termes de l’échange qui ne leur sont pas favorables, aux prix élevés des aliments bétail et à la fermeture des marchés à bétail dans plusieurs localités.

Mesdames et Messieurs,

La prochaine période de soudure en Afrique de l’Ouest et au Sahel s’annonce difficile, avec une augmentation spectaculaire du nombre de personnes qui auront besoin d’une aide alimentaire et nutritionnelle d’urgence. En effet comme indiqué dans les termes de référence de cette rencontre, près de 34 millions de personnes seront menacées par la faim et la malnutrition si des mesures appropriées ne sont pas prises d’ici la soudure 2022. Ce chiffre est trois fois plus élevé que les estimations d’il y a quatre ans.

Cette situation est exacerbée par la persistance de l’insécurité et des conflits armés qui continuent d’entrainer des mouvements massifs des populations dans la région. A la date du 31 octobre 2021, 2 136 818 personnes déplacées sont enregistrées dans le Sahel central et le Liptako-Gourma, et 5 417 841 personnes déplacées dans le bassin du Lac Tchad (IOM, Octobre 2021) ce qui affecte davantage l’accès aux moyens de subsistance, aux services sociaux de base (écoles, santé et eau), à la transhumance, au commerce et aux autres activités vitales.

Mesdames et Messieurs

Pour être plus précis, au Niger par exemple, on estime que 4 402 000 personnes seront en insécurité alimentaire sévère pendant la période de soudure (Juillet-Aout) soit environ 20% de la population totale et le taux global de malnutrition aiguë sera de 12,5 % et celui de la malnutrition sévère de 2,7%, dépassant les seuils d’urgence fixés par l’OMS qui sont respectivement de 10% et 2%. C’est dans un tel contexte que le Niger, doit également prendre en charge plus de personnes déplacées à l’intérieur du pays et près de 250 000 réfugiés.

De même, au Mali, 7,5 millions de personnes, soit un tiers de la population, ont besoin d’une aide humanitaire. La situation en Mauritanie est tout aussi alarmante, avec une augmentation des personnes en insécurité alimentaire estimée à 661 000 personnes en 2022, soit 15% de la population.

Mesdames et Messieurs

Il est donc urgent d’agir pour éviter la crise alimentaire qui s’annonce. Je lance un appel aux pays sahéliens et de l’Afrique de l’Ouest, à nos organisations sous régionales (UMEOA, CEDEAO et CILSS) et à la communauté internationale pour augmenter de manière significative et urgente leur financement. En effet, il est urgent de disposer des ressources nécessaires pour assurer une réponse rapide et efficace qui sauve des vies et protège les moyens de subsistance des personnes les plus vulnérables, en englobant les réponses en matière d’alimentation, de moyens de subsistance, de nutrition et de santé.

Je lance cet appel avec d’autant  plus d’inquiétudes que je constate que malgré l’accroissement des besoins dans la région, les financements des plans de réponse humanitaire  sont en constante baisse depuis 2012 et que  tous les pays concernés terminent l’année 2021 en ayant financé à peine la moitié de leurs plans de réponse humanitaire. Le plan de réponse 2021 du Niger par exemple, n’était financé qu’à 42% à la fin de l’année.

Mesdames et Messieurs

Les personnes en situation de crise ont à la fois des besoins conjoncturels d’assistance humanitaire et des besoins structurels de développement.

Les crises prolongées ont exacerbé les besoins humanitaires et impacté négativement les gains du développement. Aussi, au-delà des interventions d’urgence, est-il impératif que les pays sahéliens, ainsi que la communauté internationale, renforcent leur soutien aux efforts de développement avec notamment des financements multi-annuels et flexibles, afin de s’attaquer aux causes profondes de la vulnérabilité à l’insécurité alimentaire et nutritionnelle dans la région. Cela devrait se refléter dans la contribution des partenaires, laquelle doit se baser sur les priorités nationales, ainsi que l’engagement dans des initiatives conjointes, en donnant la priorité à une approche pluriannuelle, multisectorielle et adaptée au contexte. A cet effet, il me plait de souligner les efforts en cours à travers la mise en œuvre de la feuille de route de l’Alliance Globale pour la Résilience (AGIR) au Sahel et en Afrique de l’Ouest qui ont permis dans plusieurs pays dont le Niger avec la Stratégie de l’Initiative 3N, de mettre en cohérence les politiques et les stratégies de sécurité alimentaire et nutritionnelles et de la résilience.

Mesdames et Messieurs

Les catastrophes causées par les aléas naturels et les conflits représentent une menace importante pour le développement durable et la paix. Par ailleurs, Il a été démontré que, dans les situations de crises, l’approche séquentielle n’est pas une solution appropriée, et que les actions humanitaires, combinées aux actions de développement sont plus efficaces. Ainsi dans le contexte des conflits et de crises prolongées que connait le Sahel, l’approche Nexus qui lie l’aide humanitaire, le développement et la consolidation de la paix est pertinente. En effet, cette approche permet d’assurer la cohérence, la complémentarité et la collaboration à tous les niveaux de l’interface action humanitaire-développement-paix afin de réduire à la fois les besoins, les vulnérabilités et les risques mais aussi de s’attaquer aux facteurs et aux causes sous-jacentes de conflit sur le long terme.

Mesdames et Messieurs

Avant de terminer, je voudrais constater avec vous que la complémentarité et la synergie des actions prennent forme. Il s’agit maintenant, et tous ensemble, de nous engager résolument dans l’action. A cet égard, je me félicite de la tenue de la présente concertation qui permettra le nécessaire renforcement du plaidoyer et l’indispensable mobilisation des ressources en faveur de la paix et de la réponse aux besoins immédiats et de résilience des populations. Pour ma part, je puis vous assurer de mon entière disponibilité à vous accompagner dans cette entreprise salutaire.

Je vous remercie de votre aimable attention.

 



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