Assemblée nationale : vers l’institution d’une pension de retraite et d’un passeport diplomatique pour les anciens députés
L’Assemblée nationale est convoquée en session extraordinaire à partir de ce lundi 1er mars pour statuer, entre autres, sur la modification de la proposition de loi portant institution d’un régime de retraite parlementaire au Niger. Le gouvernement a examiné et donné son avis sur cette loi qui date de 2003 mais qui n’a jamais été appliquée en raison des controverses qu’elle a suscitée au sein de l’opinion publique et de la levée de bouclier de la société civile. Lors du dernier Conseil des ministres, le gouvernement a aussi adopté un décret qui accorde désormais le passeport diplomatique aux anciens députés.
A quelques jours de la fin de leurs mandats, la prochaine législature débutera le 17 mars prochain, les députés sortants sont convoqués en session extraordinaire à partir de ce lundi 21 mars 2021. Au menu de cette session convoquée par décret du Président de la République conformément aux textes en vigueur, l’examen et l’adoption, entre autres, de « la proposition de loi modifiant et complétant la proposition de loi 2003-062 du 17 décembre 2003 instituant et réglementant un régime retraite parlementaire au Niger ». La proposition de loi a été examinée par le gouvernement lors du dernier Conseil des ministres du vendredi dernier, et l’avis de l’exécutif sera transmis à l’Assemblée nationale conformément au règlement intérieur de l’institution législative.
Une ancienne loi controversée…
Le retour de ce texte tant controversé risque de soulever une nouvelle polémique dans le pays. Ce n’est pas la première fois que l’Assemblée propose et que le gouvernement examine avant que la procédure d’adoption de la loi portant institution d’un régime parlementaire ne capote, en raison de la levée de bouclier qu’elle soulève tant auprès de l’opinion publique que de la société civile. La loi date de 2003, sous la 5e République, mais elle n’a jamais été suivie d’effet en raison justement de l’opposition qu’elle a, à chaque fois, suscité dans le pays. Cela en dépit du fait que plusieurs anciennes lois fondamentales, notamment celles par exemple de la IVe, Ve et l’éphémère VIe République l’avaient consacrées en ces termes : « la fonction de parlementaire donne droit à une pension sous réserve de l’accomplissement de deux (2) mandats consécutifs ».
En 2008, par exemple, alors que l’actuel chef du gouvernement, Brigi Rafini, occupait les fonctions de quatrième (4e) vice-président de l'Assemblée nationale du Niger, une proposition de modification de cette loi, qui date pour rappel encore de 2003 et portant statut de député, incluait l’application de ce régime de pension parlementaire. Mais face au véritable tollé au sein de la société civile et de l’opinion publique qu’elle a suscité, les députés ont dû faire marche arrière comme à de nombreuses reprises. Selon Brigi Rafini, alors quatrième vice-président de l'Assemblée nationale, on le rappelle, « cette loi vise à valoriser, sécuriser et à rendre plus performante la fonction de député ». Mais, pour les organisations de la société civile, les députés, (au nombre de 113 à l’époque contre 171 aujourd’hui), cette loi ne fait que consacrer, « le pillage des deniers publics », à travers l'amélioration de leurs avantages pécuniaires et de leurs privilèges dans le nouveau statut, alors que la majorité de la population de ce pays pauvre d'Afrique de l'ouest est confrontée à des problèmes de survie quotidienne. « Au moment où des secteurs sociaux comme la santé, l'éducation, l'hydraulique, connaissent des difficultés de fonctionnement faute d'allocations budgétaires suffisantes, il est inadmissible que les députés renforcent leurs avantages », avait déclaré à l’époque, l’actuel représentant du NDI au Mali, Badié Hima, alors qu’il était le porte-parole de Convergence citoyenne, une association de la Société civile membre de la Coalition Qualité et Equité pour la Vie Chère. Des griefs actualisés encore aujourd’hui par d’autres associations de la société civile comme « Niger Stop Corruption », une plateforme très active dans la lutte contre la Corruption au Niger, et qui s’insurge contre « une rupture d’égalité entre citoyens ». Il faut dire que ce n’est pas la dernière fois, ces dernières années que des institutions comme l’Assemblée nationale, soient prises en flagrant délit d’actes qui n’honorent pas le pays comme le dépassement budgétaire, les passe-droits, la corruption, la concussion et autres actes répréhensibles et non dignes d’une institution aussi nobles. Avec pour notre défense, des rapports de l’Inspection générale d’Etats, de la Cour des Comptes et autres rapports officiels consultables à loisir et qui prouvent, si besoin est, qu’on est loin de la délation…
Nouvelle tentative de faire passé un texte à controversé
Cette fois sera-t-elle alors la bonne ? Tout laisse à le croire malgré l’avis du gouvernement car elle intervient dans un contexte particulier, celui de la fin d’une législature et des deux mandats du Président Issoufou et beaucoup de députés qui ont accumulés de nombreux mandats, risquent de ne plus revenir dans l’hémicycle ou tout au plus de réaliser leur dernier mandat.
Il convient de relever du reste que lors du dernier Conseil des ministres du vendredi 26 février 2021, le gouvernement a examiné et adopté le décret modifiant et complétant la loi 2015/469/PRN/MAE/C/IA/NE portant réglementation des conditions de délivrance du passeport diplomatique. Au terme de ce décret, les anciens députés sont désormais bénéficiaires du passeport diplomatique.
Avec le contexte actuelle marqué par des tensions politiques entre pouvoir et opposition sur les résultats de l’élection présidentielle, la société civile et l’opinion publique, qui ont jusque-là servies de vigie pour remettre en cause les multiples tentatives des députés de « se sucrer davantage sur le dos du contribuable », la nouvelle tentative des députés risque de passer comme lettre à la poste quelqu’en soit l’avis du gouvernement. Pour ce dernier, cela pourrait s’interpréter comme un cadeau de fin de mandat du Président Issoufou bien que l’institution d’un régime de pension de retraite pour les députés est monnaie courante dans beaucoup de pays africains et au delà. Mais pour un pays classé dernier en matière d’Indice de développement humain (IDH/PNUD) et qui fait face à d’innombrables défis socioéconomiques qui handicapent sa marche vers l’atteinte des Objectifs pour le Développement Durable (ODD), est ce vraiment une priorité ? C’est là toute la question ou comme disent les anglais, That is the question… Et les prochains jours nous édifieront !
A.Y.Barma (actuniger.com)
Commentaires
Soubahana vous
La politique est un b
Voil