Des Japonais font «pousser» des foies humains
Les scientifiques ont réussi à fabriquer des bourgeons d'organes partiellement fonctionnels en cultivant ensemble différents types de cellules.
Des chercheurs japonais ont découvert une recette pour faire pousser in vitro des foies humains. Dans un article publié jeudi dans Nature, ils exposent comment la mise en culture commune de trois types de cellules différentes a permis de fabriquer des «embryons» de foies, aussi appelés bourgeons.
Des cellules humaines hépatiques dérivées de cellules souches, des cellules de cordon ombilical et des cellules issues de la mœlle osseuse disposées dans un même récipient se sont spontanément assemblées dans des structures 3D de foie de 4 à 5 mm de diamètre en quelques jours.
Takanori Takebe, de l'université de Yokohama, et ses collègues ont alors transplanté ces organes miniatures chez des souris, dans des parties facilement observables - le crâne et l'abdomen. Ils ont pu constater que l'organe était bien vascularisé et que ce réseau de micro-veines s'était bien adapté à celui de la souris: en d'autres termes, le greffon avait pris. Les chercheurs ont également détecté la présence de molécules typiquement produites par le foie, comme l'albumine humaine, preuve que l'organe exécutait bien certaines tâches classiques. Mieux encore, ces foies excédentaires ont permis à des souris de survivre à des injections létales de drogues. L'organe vital «artificiel» remplissait donc bien sa fonction d'épuration.
Ce ne sont pas les premiers foies artificiels créés. En 2010, notamment, des Américains avaient réussi à injecter des cellules hépatiques et veineuses dans une matrice en collagène animal - souris ou furet - pour obtenir de petits organes fonctionnels. Cette piste de recherche a comme prolongement naturel l'utilisation de matrices plus grosses, porcines puis humaines, pour arriver à des organes suffisamment gros pour pallier la pénurie chronique de greffons. Elles n'ont malheureusement pas (encore?) abouti.
Application dans la recherche pharmaceutique
La voie japonaise a quant à elle un objectif contraire: réduire la taille des bourgeons à environ un dixième de millimètre afin de pouvoir les injecter dans le foie malade. La prolifération de ces milliers de bourgeons sains permettrait alors de régénérer l'organe vital et de guérir ainsi les patients. Les auteurs n'espèrent toutefois pas atteindre leur objectif avant une dizaine d'années.
En attendant, tous ces organes artificiels pourraient tout de même trouver des applications dans la recherche pharmaceutique. Les tests de toxicité pour le foie se font actuellement avec des cellules hépatiques de cadavres. Comme il n'y en a pas assez, une partie de ces tests ne peut se faire que pendant les essais cliniques sur des cobayes. Un danger pour leur santé et un surcoût pour les laboratoires en cas de découverte tardive d'effets secondaires très importants sur le foie.