Assemblée nationale : Le ministre Hassoumi Massoudou répond à une «Question d'Actualité» sur le Hadj 2015
Le ministre de l'Intérieur, de la Sécurité publique, de la Décentralisation et des Affaires coutumières et religieuses, M. Hassoumi Massoudou, était samedi dernier à la tribune de l'hémicycle pour répondre à une « Question d'Actualité » posée par un groupe de députés de l'Opposition sur le Hadj 2015.
En effet, conformément à leur prérogative de contrôle de l'action gouvernementale, les députés peuvent entendre en plénière soit le Premier ministre soit tout autre membre du Gouvernement sur un sujet d'intérêt national. Selon le Règlement intérieur de l'Assemblée nationale, les députés peuvent exercer cette prérogative de solliciter des informations ou d'entendre tout membre du Gouvernement dans les formes d'adressage suivantes : « une Question orale » ; « une Question d'Acutalité » ou « une Interpellation ».
Voici dans leur intégralité «la Question d'actualité» posée par les députés et les réponses du ministre
Hassoumi Massoudou.
L'exposé du ministre a été suivi de débat au cours duquel tous les groupes parlementaires ont eu un temps égal de parole. Puis, le ministre a repris la parole pour répondre à toutes les préoccupations soulevées. Dans la soirée du même samedi, les députés on enchainé avec une deuxième « Question d'actualité» cette fois ci posée au ministre de la Défense nationale, M. Karidjo Mahamadou, relativement à la situation sécuritaire dans la Région de Diffa. Mais cette séance s'est déroulée à huis clos pour des raisons tenant à la défense
nationale.
Question d'actualité du groupe des députés de l'opposition sur le hadj 2015
«Cette année, le hadj, cinquième pilier de l'Islam a été fortement endeuillé suite à la bousculade intervenue le 24 septembre 2015 au cours du rite de la lapidation de Satan durant lequel plusieurs centaines de pèlerins ont trouvé la mort. Paix à leurs âmes. Notre pays a été éprouvé par cette tragédie; le bilan officiel rendu public par le Gouvernement faisant état d'au moins 28 morts, une trentaine de blessés et 89 portés disparus. La gestion des suites de ce douloureux événement est malheureusement marquée par les défaillances suivantes : mauvaise communication gouvernementale sur les faits ; faible réactivité des autorités publiques au vu de la gravité de la situation ; silence du Gouvernement sur l'ajournement sine die de la mission annoncée du Ministre de l'Intérieur et des Affaires Religieuses en Arabie Saoudite ; incompréhension de l'opinion publique nationale par rapport à l'incapacité affichée du Gouvernement à fournir un bilan de la tragédie quand on sait que le hadj est une affaire d'Etat qui, plusieurs jours après le drame ne devrait laisser place à aucune tergiversation sur le nombre exact des pèlerins décédés. Cette tragédie ne doit pas nous faire oublier l'organisation du hadj qui reste dominée par la pagaille ; ce, malgré les plaintes des honnêtes citoyens, des interpellations et des recommandations des députés. L'affairisme mercantile, les passe-droits, l'arnaque et l'escroquerie ont paradoxalement pris racine sur un terrain où ils ne devraient pas avoir droit de cité, c'est-à dire le domaine de la religion qui les bannit. Cette année encore, le COHO a fait étalage de ses péchés habituels qui ont eu pour conséquences de priver des centaines de candidats au hadj d'effectuer le voyage aux lieux saints de l'Islam ou encore de permettre à des affairistes d'en dépouiller d'autres à travers des artifices savants tels que l'augmentation du prix du transport à la dernière minute ou le double acquittement du mouton de sacrifice pour ceux qui ont pu se rendre à La Mecque. Aussi,
vous demandons-nous d'éclairer la Représentation nationale sur les points suivants:
1.Le bilan exact de la tragédie de Mina pour notre pays ;
2.Les mesures prises pour la prise en charge des blessés ;
3.L'organisation du retour des pèlerins et leurs bagages
4.Les démarches entreprises auprès des saoudiens pour une éventuelle réparation des préjudices subis par les pèlerins et/ou leurs ayant-droit ;
5.Les mesures envisagées pour éviter certains problèmes récurrents (Transport, visa, encadrement, hébergement) du dispositif du hadj au Niger ».
Réponse du ministre de l'Intérieur, de la Sécurité publique, de la Décentralisation et des Affaires Religieuses, M. Hassoumi Massoudou
«Je dois d'abord préciser et cela pour éviter toute autre spéculation que la tragédie qui est survenue à Mina le 24 septembre 2015 au cours du pèlerinage avait pour cause, et cela selon des témoignages même de certains pèlerins qui étaient sur place, une bousculade à un moment où il y régnait une chaleur torride. Ici au Niger, le lendemain de cette tragédie, le Président de la République, Issoufou Mahamadou, avait réagi par la convocation d'un Conseil des ministres extraordinaire le 25 septembre 2015. Il est découlé de cette réaction deux grandes décisions que sont : la création de deux Comités. Un à Niamey sous l'autorité de la ministre Déléguée aux Affaires Etrangères et une deuxième à la Mecque sous l'autorité de l'ambassadeur du Niger en Arabie Saoudite et ce Comité comprenait le Commissaire au Hadj qui se trouvait à la Mecque ainsi que le Consul du Niger et son équipe qui étaient sur place.
Le Comité mis en place ici au pays comprenait toutes les compétences des différents Ministères impliqués dans l'organisation du Hadj et travaillait étroitement avec celui mis en place en Arabie Saoudite pour gérer cette crise de manière rigoureuse et organisée et aussi et surtout informer régulièrement l'opinion nationale sur le bilan de cette tragédie. La deuxième décision était celle d'envoyer un ministre, en l'occurrence celui en charge de l'Intérieur, pour présenter les condoléances du Président de la République et du Gouvernement aux pèlerins ; se rendre compte de la prise en charge de nos pèlerins sur le plan psychologique et s'enquérir des conditions d'organisation de la gestion de cette crise par les autorités saoudiennes.
Ces deux comités ont fait un travail remarquable et cela même comparativement aux autres pays africains concernés par cette tragedie. Il y a eu un bon et régulier suivi de la situation avec production de rapports et des communications régulières. Sur le plan informations, l'ambassadeur Ali Marou a fait des points de presse. Au niveau de la Mecque également le Comité
mis en place a opéré régulièrement et métho-diquement en faisant la collecte et la tournée au niveau des hôpitaux et des points d'hébergement pour répondre à toutes les questions que se posaient les pèlerins sur les prises en charge. J'ai, à mon tour effectué une mission en Arabie Saoudite du 6 au 9 octobre, j'ai vu les conditions de travail des équipes de l'Ambassade, du consulat et du COHO, qui travaillaient jour et nuit sous pression.
Je voudrais ici leur rendre hommage à ceux qui étaient sur le terrain comme aux membres du Comité ici au pays sous la présidence de la ministre Déléguée aux Affaires Etrangères qui ont fait un travail rigoureux. Toutes les dispositions et toutes les mesures qui doivent être prises par un gouvernement l'ont été. Il n y a donc eu aucun mauvais travail encore moins une mauvaise communication autour de cette question et je suis profondément désolé que sur une tragédie pareille, une situation de détresse soit transformée dans notre pays en objet de polémique. Evidemment l'Arabie Saoudite est un pays souverain. Nous n'allons pas nous substituer à eux pour faire l'enquête, ni leur imposer la façon dont ils gèrent leur crise. Sur ce plan nous sommes respectueux de leur souveraineté.
D'ailleurs quand j'ai été en Arabie Saoudite, ils ont tenu à me montrer la chaine de gestion de cette situation. On a visité la morgue et le cimetière et tout le dispositif d'identification mis en place. D'abord ils ont, selon le rite musulman, inhumé les morts dans des tombes individuelles, il n'ya donc pas eu de fosse commune. Avant d'enterrer chaque corps dont ils n'ont pas l'identité, ils ont procédé par la prise d'empreinte digitale de chaque victime non identifié. Un numéro est attribué à chaque corps dont l'empreinte a été relevée et la procédure suivante est de remonter, à partir de ces empreintes relevées, aux fiches d'entrer en Arabie Saoudite. Un travail technique de comparaison fait ressortir les informations sur chaque empreinte digitale, qui est unique à tout individu. Quand l'identité est trouvée à partir de l'empreinte un certificat de décès est établi et transmis à l'Ambassade du pays de la victime et à sa famille.
C'est un travail fastidieux pour lequel nous avons confiance aux saoudiens pour donner progressivement le bilan de cette tragedie. D'ailleurs nous n'avons aucun moyen de nous substituer à eux pour faire le travail d'identification qu'ils sont en train de faire. Mais l'efficacité de cette méthode est qu'ils nous transmettent régulièrement la mise à jour du bilan par pays. C'est ainsi qu'au 23 octobre 2015 le bilan pour les pèlerins nigériens est le suivant : 92 morts, 22 disparus, 34 blessés. Ce bilan a donc évolué parce que le travail d'identification permet de ne plus classer les personnes décédées dont l'identité a été retrouvée parmi les personnes disparues.
Pour ce qui est des blessés, ils ont tous été pris en charge dans les hôpitaux par les autorités saoudiennes. Du côté du Gouvernement et du Comité, il a été fait un travail complémentaire pour assurer cette prise en charge et à mon arrivée en Arabie Saoudite j'ai amené une somme de 10 millions de FCFA remise par le Cabinet du Premier ministre pour renforcer cette prise en charge des blessés à travers les services de santé du COHO. Ça c'est en Arabie Saoudite. Le Chef de l'Etat a fait dépêcher un vol spécial pour rapatrier les blessés le 7 octobre et il a effectué personnellement le déplacement à l'aéroport pour les accueillir. La ministre Déléguée aux Affaires étrangères leur a rendu visite et ils sont entièrement pris en charge par l'Etat.
En ce qui concerne la question du retour des pèlerins et leurs bagages, je vous informe qu'à la date d'hier l'ensemble des pèlerins nigériens est rentré au pays et ils ont été transportés avec leurs bagages. Le retour des pèlerins avec leurs bagages a de tout temps été un casse tête dans notre pays. Mais à cette édition, cela ne reste qu'un lointain mauvais souvenir. Pour ce qui est des critiques sur l'organisation même du Hadj vers les Lieux Saints à partir de notre pays je les trouve, en ces circonstances tragiques, indécentes. Et j'espère que dans l'esprit de ceux qui m'ont interpelé ici ce n'est pas l'organisation du Hadj à partir du Niger qui a provoqué cette tragédie. Donc je trouve indécent et inconvenant, pour des raisons de politique politicienne qu'on fasse l'amalgame entre l'organisation du Hadj au niveau de notre pays et la tragedie qui s'est passée à Mina.
Pour les questions essentielles de l'organisation du Hadj à partir de notre pays notamment les questions de transport et celles liées à l'hébergement, la restauration au niveau des villes de la Mecque et
Médine et sur le site de Mina beaucoup a été fait en termes d'amélioration. Cependant le Commissariat au Hadj va faire un rapport dans lequel tout ce qui s'est passé et toutes les recommandations seront faites».
Onep
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