Guinée : l'ex-dictateur Dadis Camara gracié après 8 mois, malgré 20 ans pour le massacre de 156 civils
C'est un coup de théâtre qui secoue la Guinée : l'ancien dictateur Moussa Dadis Camara, condamné à 20 ans de prison pour le massacre de 156 civils en 2009, vient d'être gracié après seulement 8 mois de détention. Le général Mamadi Doumbouya a accordé cette libération controversée officiellement pour "raison de santé", suscitant l'indignation des familles de victimes. Une décision annoncée par décret vendredi soir à la télévision nationale, officiellement pour « raison de santé », mais qui suscite déjà une vive émotion en Guinée et au-delà. La justification avancée par la présidence – son état de santé – interroge : aucun problème médical grave n’avait été signalé jusqu’alors.
Condamné en août 2024 à 20 ans de réclusion criminelle pour crimes contre l'humanité, Dadis Camara venait tout juste de purger 8 mois de sa peine. Le procès historique - le premier du genre en Afrique de l'Ouest pour un ex-chef d'Etat - avait duré près de deux ans et été salué comme une avancée majeure pour la justice transitionnelle.
"Sur proposition du garde des Sceaux, une grâce présidentielle est accordée à M. Moussa Dadis Camara pour raison de santé", a déclaré le général Amara Camara, porte-parole de la présidence, sans fournir de détails médicaux.
Cette décision ravive les plaies d'un des épisodes les plus sombres de l'histoire guinéenne. Le 28 septembre 2009, les forces de sécurité avaient réprimé dans le sang un rassemblement de l’opposition. Bilan : 156 morts, plus de 100 femmes violées et des centaines de blessés, selon un rapport de l’ONU. Les scènes d’horreur qui s’étaient déroulées dans l’enceinte sportive et aux alentours sont gravées dans la mémoire collective.
Si cette grâce intervient dans un contexte où la junte avait récemment promis la prise en charge des indemnisations des victimes, elle jette une ombre sur l’indépendance de la justice guinéenne. Pour de nombreux observateurs, cette décision est un recul, voire une trahison pour les victimes et leurs familles.
« Comment peut-on gracier un homme condamné pour un crime aussi grave ? C’est un coup de poignard pour les familles des victimes », s’indigne un militant des droits humains à Conakry.
Le procès du massacre du 28 septembre 2009 était perçu comme une avancée majeure dans la lutte contre l’impunité en Guinée. La libération de Dadis Camara met désormais en péril cet acquis et soulève une question fondamentale : la justice est-elle une simple variable politique en Guinée ?
Cette grâce risque également d’enflammer une opinion publique déjà méfiante envers la junte militaire au pouvoir depuis le putsch de 2021. À Conakry, certains redoutent une montée de la contestation.
Les victimes, elles, espéraient que ce procès marquerait un tournant. La libération de Moussa Dadis Camara leur donne aujourd’hui un goût amer de justice inachevée.
Commentaires
Il sera pour Doumbouya un bon président de l’assemblée