Dialogue politique : Mahamane Ousmane interpelle à nouveau le président Issoufou et l’invite à se rappeler de l’époque où il était à l’opposition
Le RDR Tchanji a célébré, ce dimanche 8 décembre à l’Arène Salma Dan Rani de Dosso, son 3eme anniversaire qui a été couplé à la tenue de l’Assemblée générale régionale du parti. A cette occasion, un discours a été prononcé par Mahamane Ousmane, le président de l’Alliance pour la Démocratie et la République (ADR), une coalition formée par le RDR Tchanji de Falké Bacharou et le MNRD Hankuri de Sidi Moulaye Harouna Hambali. Dans son allocution, l’ancien chef de l’Etat et candidat déclaré de l’ADR aux prochaines élections, a abordé le thème retenu pour la célébration : « dialogue politique, facteur de paix, de stabilité et de développement ».
Devant les militants du RDR et de l’ADR, mais aussi les représentants des autres formations de l’opposition et du pouvoir, il a également abordé la situation politique nationale.
Dans son discours, Mahamane Ousmane a surtout interpellé le président Issoufou Mahamadou sur la nécessité de reprendre le dialogue politique, actuellement en panne, afin d’éviter au Niger d’inutiles crises. Le président Ousmane a en ce sens invité l’actuel chef de l’Etat, à se souvenir du temps où il était à l’opposition. Il a en ce sens évoqué un épisode politique de la 5e république, lorsqu’il assumait les fonctions de président de l’Assemblée nationale, avec Tandja Mamadou comme président de la République et Issoufou Mahamadou comme chef de file de l’opposition.
Voici en intégralité l’allocution prononcée ce dimanche 9 décembre par Mahamane Ousmane, le président de l’ADR, et dans lequel il rapportait comment le dialogue politique entre le pouvoir politique et l’opposition a été renoué et maintenu sous la 5e République.
Rendons Grâce à Allah, le Clément, le Miséricordieux, de nous avoir permis de nous retrouver à Dosso, aujourd’hui dimanche 08 décembre 2019, à l’occasion de la commémoration du 3ième anniversaire du RDR-Tchanji, couplé à la tenue de l’Assemblée Générale régionale RDR-Tchanji de Dosso.
Camarade Président du Bureau Politique National du RDR-TCHANJI,
Je vous remercie infiniment de m’avoir donné l’occasion de prendre la parole à l’occasion de ces deux (2) évènements d’importance majeure pour tout parti politique.
Ces deux évènements qui nous réunissent à l’Arène de lutte SALMA DAN RANI de Dosso interviennent à un moment décisif de la vie politique du Niger, c’est-à-dire à un pas de l’année 2020 qui sera caractérisée par la tenue des élections locales, législatives et présidentielle 1er Tour, selon le chronogramme élaboré et publié par la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI).
Ces évènements se tiennent aussi à un moment où tous les acteurs et observateurs de la scène politique nigérienne sont témoins de la volonté exprimée par l’opposition politique de convenir d’un dialogue politique à même de nous prémunir contre toute crise socio-politique pré-électorale, électorale et post-électorale au Niger.
Il me parait par conséquent pertinent que la commémoration de l’anniversaire de votre Parti soit placée sous le thème que vous avez retenu, à savoir : « Le Dialogue politique, facteur de paix, de stabilité et de développement ».
Chers camarades membres de l’ADR,
Chers invités,
Ce thème a d’autant plus de significations que ces évènements se déroulent dans la Région de Dosso. En effet, si on compare la situation sociale qui prévaut aujourd’hui entre les différentes composantes de la population de cette Région à celle que nous avions connue il y a quelques décennies, on peut aisément affirmer que la Région de Dosso a connu des avancées significatives en termes de stabilité et de paix sociale. Le bon-vivre ensemble existant entre les différentes communautés de cette région est le fruit de plusieurs séries de dialogues politiques et sociaux qui s’étaient tenus au milieu des années 90 entre les différentes communautés qui se côtoyaient mais s’acceptaient difficilement.
En effet, me permettrais-je de rappeler que cette époque était caractérisée par de fréquents et violents conflits entre agriculteurs et éleveurs qui endeuillaient chaque année des dizaines de familles. Face à cette situation, les autorités administratives et coutumières de la Région, soutenues par les autorités politiques nationales, avaient organisé, entre 1993 et 1999, trois (3) sessions de dialogue intercommunautaire. Chaque session avait enregistré la participation de plus d’un millier d’agriculteurs et d’éleveurs venus de tous les départements de la région, afin de discuter de la paix, de la quiétude sociale et du développement local.
Ces multiples concertations ont permis de réduire significativement les conflits intercommunautaires dans la Région de Dosso.
Il ne serait dès lors pas prétentieux de dire que le thème de votre 3ième anniversaire rime bien avec la situation de la Région de Dosso pour qui le dialogue intercommunautaire a été un « facteur de paix, de stabilité et de développement ».
Chers camarades membres de l’ADR,
Chers invités,
Cette illustration d’un exemple aussi réussi qu’actuel de dialogue ayant abouti à la paix, à la quiétude sociale et au développement prouve à juste titre qu’un dialogue politique inclusif est possible au Niger. Mieux, au vu de la situation politique délétère que nous vivons, un tel dialogue est nécessaire pour sortir le Niger de la situation actuelle caractérisée par des foyers de tensions et de conflits communautaires et sécuritaires à l’intérieur, comme sur ses frontières telles que dans le bassin du lac Tchad au sud-est et dans la zone du Liptako-Gourma, les 3 frontières au Nord-Ouest.
Manifestement, le Niger d’aujourd’hui est dans une tension et un malaise connus de tous tant sur le plan international que sur le plan national.
Sur le plan international, à travers le positionnement du Niger en termes d’IDH (Indice de Développement Humain) confinant régulièrement le Niger au dernier rang des pays de la planète.
Sur le plan national, situation non seulement connue, mais vécue par tous les Nigériens, car ils vivent dans leur âme et dans leur chair les dures réalités au quotidien sur le plan de l’alimentation, de la santé, de l’éducation, du chômage, du sous-emploi, des inégalités et du sentiment d’injustice et d’inéquité. Cette tension et ce malaise sont porteurs de hauts risques qu’il ne faut pas négliger à l’orée des consultations électorales qui s’annoncent.
Il y a péril en la demeure qu’il convient de désamorcer en utilisant les mécanismes et les vertus du dialogue.
Chers camarades membres de l’ADR,
Chers invités,
Si à un niveau communautaire, ici même dans la Région de Dosso, les communautés ont utilisé les vertus du dialogue pour aboutir à la paix, il n’y a pas de raison à ce qu’au niveau national, nous ne soyons pas en mesure de le faire.
En effet, c’est du dialogue que naissent la compréhension mutuelle et l’esprit de paix propices à la mobilisation des intelligences et des énergies pour mieux produire, mieux vivre et mieux faire prospérer les générations à venir dans ce monde en perpétuelle mutation.
Lorsque, comme dans le cas actuel du Niger, les mécanismes formels institutionnels sont bloqués (cas du Conseil de la République), en panne (cas du CNDP) ou défectueux (cas du CNDS), il ne faut pas être étonné ou être surpris que des canaux non formels ou informels prennent le relai et conduisent à des dérapages ou des situations non souhaitées.
Chers camarades membres de l’ADR,
Chers invités,
Par devoir citoyen, par obligation et responsabilité politique et sociale, par leçons d’expériences vécues et devoir de partage, par conviction pour acquit de conscience, je suis de ceux qui croient qu’il vaut mieux prévenir que guérir et le faire à temps.
Je saisis cette occasion de notre présence à Dosso pour interpeller publiquement à nouveau le Président de la République, Chef de l’Etat, Monsieur Issoufou Mahamadou. Comme vous le savez, j’ai eu à l’interpeller à d’autres occasions (meetings, déclarations, points de presse, etc…) ; cette fois-ci, contrairement à mes habitudes, je l’interpelle de manière singulière en rappelant un entretien que nous avions eu lui et moi en espérant que ce rappel contribuera à l’aider à faire baisser les tensions politiques et sociales dans l’intérêt général de la Nation nigérienne.
Cet entretien a eu lieu au bureau du Président de l’Assemblée Nationale que j’étais.
Le Président du PNDS de l’époque et Député à l’Assemblée Nationale, Monsieur Issoufou Mahamadou me disait en substance :
- « Monsieur le Président, ce que vous faites n’est pas normal. Parce que vous êtes au pouvoir et nous à l’opposition, vous refusez d’avoir toute rencontre avec nous ; ce n’est pas normal en démocratie »
- Je lui avais répondu : « je n’ai pas bien entendu »
- Il a répété exactement ce qu’il avait dit pour que je l’entende bien
- Je lui avais répondu « je n’ai pas encore compris ! »
- Il a à nouveau répété ce qu’il a dit au début
- Je lui avais encore dit « je n’ai pas compris ».
- C’est à ce moment qu’il a souri en disant « Ah bon ! »
- J’avais repris en lui disant « Oui, je ne peux pas comprendre ce que vous dites puisque c’est hier que vous avez demandé à me rencontrer et aujourd’hui nous voilà ensemble, vous, de l’opposition et moi, du pouvoir. Voilà pourquoi je ne peux comprendre votre affirmation ».
- Il avait repris en disant : « Bon. Pas vous, personnellement. Mais le Président de la République Tandja Mamadou »
- J’avais repris en disant : « Si c’est le Président Tandja, j’ai mon cabinet ; il a le sien et c’est là-bas que vous devez vous adresser »
- Le Président Issoufou m’avait dit : « Nous avons essayé, mais ça n’a pas marché. »
- Je lui avais dit : « Avez-vous vu les membres de son cabinet (protocole, aide de camp, directeur de cabinet, etc…) ?
- Il m’avait répondu : « Oui, on a tout essayé »
- Je lui avais suggéré d’écrire formellement pour demander un Rendez-Vous ;
- Il m’avait dit : « Oui nous avons adressé des correspondances plusieurs fois ; elles sont restées sans suite »
- J’avais exprimé mon étonnement.
- Il avait proposé de m’envoyer des copies. Il était sur le point de noter à cet effet.
- C’est en ce moment que je lui avais dit « Président, ce n’est pas nécessaire de me les envoyer. Je vous crois sur parole ».
- Il m’avait dit : « Tout le monde dit que le Président Tandja vous écoute beaucoup et vous êtes bien placé pour lui parler à ce sujet parce que quand nous étions à vos côtés nous vous voyions le recevoir. Il venait avec le Professeur André Salifou et le Président Issoufou Assoumane. Vous le receviez tantôt à leur demande, tantôt à la vôtre ».
- Je lui avais dit : « En effet, nous nous rencontrions souvent »
- Il m’avait dit : « Alors, il faut lui rappeler que malgré que les deux camps soient d’opinion différente, la majorité doit écouter l’opposition »
- J’avais répondu au Président Issoufou : « je ne serai pas votre messager auprès du Président Tandja. Mais je vous promets que je saisirai la première occasion qui se présenterai pour évoquer la question avec lui. Et c’est ce que j’avais fait ».
- Quand j’en avais au Président Tandja, il m’avait dit : « C’est exact. Je le recevais ; mais j’ai arrêté ».
- J’avais alors suggéré au Président Tandja de reprendre le contact avec l’opposition.
Et c’est ainsi qu’à l’occasion de l’investiture du Président Burkinabè Blaise Compaoré quand le Président Tandja et le Président Issoufou s’étaient rencontrés, le Président Tandja lui avait dit : « J’ai reçu ton message par le canal du Président de l’Assemblée Nationale ».
Et ainsi ils avaient convenu de se voir périodiquement comme beaucoup de Nigériens avaient dû certainement le constater à l’époque. Et c’est ainsi que la situation avait connu une décrispation certaine.
Chers camarades membres de l’ADR,
Chers invités,
Si j’ai tenu à faire ce rappel, ce n’est nullement pour tirer des glorioles personnelles, mais pour souligner qu’avec une volonté au plus haut sommet de l’Etat, on peut créer la sérénité sur le plan politique et social.
Après ce rappel fraternel, je demande au Président de la République, Monsieur Issoufou Mahamadou, de se rappeler ces moments-là, de se ressaisir, de reprendre contact avec l’opposition dans le cadre d’un dialogue politique démocratique et républicain afin que :
- le CNDP retrouve ses lettres de noblesses,
- le CNDS reprenne vigueur,
- le Conseil de la République siège à nouveau,
- les élections qui s’en viennent soient préparées et organisées de manière consensuelle et apaisée.
Aussi, j’en appelle à vous, Monsieur le Président issoufou Mahamadou, de faire en sorte que le dialogue politique sollicité par la classe politique, initialement accepté de part et d’autre, mais par la suite esquivé puis substitué indûment de manière unilatérale par une conférence dite des leaders des partis politiques, puisse voir le jour et se dérouler normalement. En effet, le dialogue politique est un important facteur d’apaisement, de réconciliation et de paix ; le Niger en a grand besoin, ainsi que vous-même, Monsieur le Président. N’avions-nous pas jadis, l’habitude de répéter ensemble les paroles d’un sage qui disait : « la maison qui ne se parle pas, meurt ». Le Niger ne doit pas mourir dans vos mains et ne doit même pas continuer à souffrir.
Vive le Niger
Vive la Démocratie
Vive l’ADR
JE VOUS REMERCIE
Commentaires
Je trouve maladroit, que vous ayez expos
Je trouve maladroit, que vous ayez expos